Sujet: Re: Will you see the game they're playin' ? [ft Reginald J. Anstruther] Dim 20 Nov - 6:33
Will you see the game they're playin' ?
« That is the effect absinthe has, and that is why it drives men mad. »
Griffin se raidit à l'évocation de ce que lui même aurait apparenté à un relâchement de sa part. -La perte de contrôle ne m'effraie aucunement, étant donné que c'est naturellement que je mène la danse, rétorqua-t-il d'un ton tranchant, bien loin de celui qu'il avait l'instant d'avant où, perdu dans ses pensées, il avait fait cette confession à l'homme qu'il considérait de moins en moins un pion. Ici il n'est pas question de contrôle, l'alcool étourdit tout simplement les sens, dont la raison. Il marqua un temps, posa une nouvelle fois le bord en cristal contre ses lèvres afin de laisser ladite fée qu'il cherchait plus tôt se glisser au plus profond de lui même afin d'éclairer son esprit; le feu s'occupant déjà de réchauffer son cœur refroidi par l'éternelle pluie de Londres. -Cela ne veut pas dire que je ne suis plus en état de mesurer mes actes, au contraire...
Il l'avait longuement regardé; d'abord se lever, presque caresser du bout de ses doigts les bords de l'harmonieuse machine, puis s'appuyer nonchalamment au plus près de la source de chaleur crépitante; pour finalement replonger au fond de son verre, évitant ainsi de croiser le regard de son interlocuteur sans s'en rendre compte. Il ne répondit d'ailleurs pas à sa dernière remarque concernant le roman, soit parce qu'il n'avait pas entendu, soit par manque d'intérêt pour la morale, tout simplement. Il était de nouveau perdu dans le liquide à la saveur acre et dans ses pensées, jusqu'à ce qu'un mot en particulier attire de nouveau son attention, assez au moins pour qu'il relève la tête et trouve les yeux irisés d'or par les flammes de son partenaire à quelques mètres au dessus de lui. Il était d'autant plus impressionnant encore sous cet angle, suffisamment pour que le bourgeois, qui semblait se perdre en lui même de plus en plus au fur et à mesure que la soirée avançait, se sente obligé de se lever complètement de son fauteuil; si bien qu'il n'avait maintenant qu'à hausser le menton légèrement pour faire face à celui qui ne cessait de le confronter à lui même. -La beauté est quelque chose d'éphémère Sir. Effervescente, figée dans le temps. Il fit une pause. Quelques secondes à peine, mais des secondes qui lui parurent une éternité, sentant son regard peser sur lui. -C'est pour cela que les fleurs se fanent et que les jeunes filles se rident, la beauté est un phénomène naturel, impossible à reproduire par la main l'Homme. On peut toujours restaurer une oeuvre d'art, mais elle ne sera jamais qu'une pale copie de l'originale, incapable de l'égaler ou d'avoir la même émotions qui se dégageait de la toile jadis. La beauté est la chose la plus précieuse que nous puissions posséder, sans elle que somme nous sinon rien ? Des êtres aigris qui cherchent le contentement dans la magnificence de l'autre, jalousant ce qu'il possède et qui nous a été injustement mais inévitablement arraché par le temps. Voilà à quoi nous en sommes réduits sans elle: à nous contenter de grappiller un semblant de bien être chez les plus jeunes, à essayer de ressentir quelque chose qui s'en était allé avant même que l'on ne s'en rende compte...
Sujet: Re: Will you see the game they're playin' ? [ft Reginald J. Anstruther] Lun 21 Nov - 3:32
Le ton s’était fait plus tranchant, peut-être même plus que ne l’aurait voulu le propriétaire des lieux alors qu’il niait avoir peur de perdre le contrôle. Devant cet aveu, bien involontaire cette fois, le médecin se garda bien d’avoir la moindre réaction, néanmoins, un léger sourire étira le coin de ses lèvres. Si vous le dîtes très cher pensa-t-il avec un amusement que, pour une fois, il maîtrisa. – Cela ne veut pas dire que je ne suis plus en état de mesurer mes actes… Se défendit l’homme au teint diaphane. – Bien entendu. La lueur mutine dans le regard du brun s’était communiquée à ses lèvres, puisque sa remarque s’était faite plus mutine qu’il l’aurait voulu. La fée verte en était-elle la cause ? Possible. Peut-être était-ce la naturel irrévérencieux et taquin qui revenait à la surface, aidé par la créature, supposément reine de la liqueur qu’ils venaient de consommer. Un léger silence vint de nouveau prendre possession du bureau, aucun des deux hommes ne parlait, mais James avait pu sentir le regard du bourgeois se poser sur lui, le détailler, sans aucune pudeur. Il n’y avait aucune retenue dans cette observation presque minutieuse, aucun masque. L’absence de remarque sur l’immoralité dont chacun dans la bonne société avait estampillé le roman de Wilde, fit penser à l’aristocrate que peut-être, son nouvel ami était peu soucieux de moralité, de se conformer aux bonnes mœurs, tout du moins en privé. Et puis, par un étrange phénomène, le dandy se leva à son tour de son fauteuil et les deux hommes finirent par se trouver singulièrement proches l’un de l’autre, comme si des aimants avaient été injectés dans leurs êtres respectifs. Tout s’était fait de manière assez progressive en réalité, mais peut-être l’Absynthe avait-elle embrumé leurs esprits et tu toute conscience de ce qui se déroulait pourtant sous leurs yeux, comme s’ils étaient devenus les marionnettes et les marionnettistes de leur propre spectacle.
Sans quitter cette position qui, sans doute aurait été qualifiée d’inappropriée et gênante s’ils étaient restés en présence de leurs épouses, des autres convives, un débat naquit sur l’essence de la beauté, la finitude de l’homme et le passage impitoyable du temps. Regardant son hôte pendant qu’il glosait sur la beauté, quelque chose d’étrange se déclencha et son regard, pourtant vif et alerte, ne put résister à l’appel des lèvres en mouvement de son interlocuteur, ce pour quoi il se morigéna intérieurement aussitôt qu’il en prit conscience. – Certes la beauté est éphémère, elle nous échappe un peu plus chaque jour, mais n’est-ce pas aussi ce qui fonde son caractère même ? Si elle restait immuable, inaltérable, elle perdrait sans doute de son attrait. Puis, sortant de cette demi torpeur dans laquelle l’alcool l’avait plongé, il planta son regard dans celui de Griffin et lança avec malice. – C’est d’ailleurs, presque une addiction propre à l’homme. La recherche du beau. Il avait, à dessein, choisi de ne pas parler de la beauté, mais d’utilisé son référent masculin, comme une nouvelle sonde lancée dans l’inconnu que demeurait la personnalité du dandy. Puis, il fit un pas vers le guéridon où il effleura d’un geste absent le gouleau de la bouteille. – Mais pardonnez moi, j’abuse de votre hospitalité… Lança-t-il en esquissant un pas vers la porte.
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Sujet: Re: Will you see the game they're playin' ? [ft Reginald J. Anstruther] Lun 21 Nov - 17:47
Will you see the game they're playin' ?
« Do not throw away your shot... »
A cet instant précis on toqua à la porte, et tout naturellement mais avec un léger soupir dans la voix, le maître de maison intima d'entrer. La porte s'entrouvrit d'abord lentement, presque craintivement, puis de toute son ampleur et on pu alors voir apparaître une dame de petite taille vêtue d'un tablier, les cheveux maladroitement rassemblés en un chignon qui ressemblait plus à un nid qu'à autre chose. -Je m'excuse de vous dérangez, mais Madame m'a demandé de vous informer que les chambres de l'aile ouest ont été préparées pour Monsieur et Madame Anstruther, étant donné l'heure tardive... -Parfait, merci Elisabeth, vous pouvez disposer. La jeune femme à la peau sombre sortit en refermant tout doucement la porte, car elle savait que le claquement de celle-ci irritait au plus haut point celui qui possédait toute autorité dans la demeure. Comme elle quittait la pièce Griffin vint se replacer face à son invité, lui remplis sa coupe une seconde fois et la lui tendit, plantant un regard joueur mais aussi plein de défi dans le sien, comme si l'annonce de la domestique ne venait que confirmer ses plans. -Il semble que ma femme craigne de vous laisser partir dans le froid, ou qu'elle veuille discuter avec la vôtre encore quelques heures. Dans les deux cas, j'ose espérer qu'un verre de plus ne sera pas de trop... Au coin de ses lèvres cet éternel sourire, presque moqueur, semblait inviter l'aristocrate à se laisser tenter par l'inconvenance. D'ailleurs, ses gestes et ses yeux ne disaient pas le contraire: les doigts de sa main libre ne cessaient de pianoter dans l'air nerveusement tandis que ses pupilles se dilataient. Sous l'effet de l'alcool ou à la vue de son compère ? Impossible à déterminer au premier abord, mais le déroulement des minutes suivantes de tarderait pas à nous le dire.
En réalité, ce revirement de situation était prévu, ou tout du moins attendu. Comme il l'avait dit plus tôt dans la soirée, notre chasseur connaissait son épouse et sa tendance à s'inquiéter pour les autres, notamment lorsque le soir venu une partie de ses invités devaient rentrer plus tard que les autres. Il contait sur cela pour lui ouvrir une plus large fenêtre de tir, une nuit entière où il pourrait essayer d'entrevoir les intentions de son ami, et ainsi calculer le temps qu'il lui faudrait pour mener à bien ses projets personnel. Et même si la soirée était loin de se passer comme prévu, ce n'était pas pour lui déplaire. En effet, malgré son état il avait remarquer l'attardement de Reginald sur ses lèvres. Les yeux ne trompent pas, et à cet instant là, il n'était pas très loin d'atteindre son but et de le faire céder. Peut importait, il lui restait plusieurs heures pour y parvenir, et il comptait bien les utiliser avec discernement.