Le repas pour les pauvres de la ville était l'événement le plus important du mois pour sœur Elisabeth et cette dernière s'investissait dans la préparation de celui-ci depuis que la mère supérieure lui avait demandé de faire partie de celles qui seraient de service ce soir-là. La jeune femme, depuis, espérait que tout se passerait bien et qu'ils pourraient dans un proche avenir, si tout avait été correct cette première fois, recommencer l'opération plusieurs fois. Cela lui semblait important, ce genre d'initiative et elle comptait sur la générosité des Londoniens pour que cet acte fasse écho.

Ce jour-là, de fait, plongée dans les préparatifs, la demoiselle avait eut affaire à sa propre famille. Les de Booth étaient venus en personne porter quelques fruits des vergers où, enfant, la jeune femme d'aujourd'hui prenait plaisir à courir en cueillant ça et là les fruits qui lui faisaient envie. Elle avait prit le temps de parler un peu avec eux, tout en continuant son travail, avant de les regarder partir, le cœur se serrant quelques peu de ne point les suivre, goûter de nouveau à la chaleur du foyer familial, aux gentillesses de sa mère, de son père, de leurs gens qui dans le temps, prenaient tant soin d'elle et qu'elle appréciait. Mais rapidement sa tâche et l'importance de sa mission revint à son esprit et la demoiselle se replongea totalement dans ses préparatifs.

«- Monsieur Downcry !» s'exclame-t-elle en le croisant, une heure avant le lancement du souper.

Comme il lui donne une pomme, la jeune femme regarde celle-ci sans comprendre, avant de lever un sourcil vers lui, observant les détails de son visage.

«- Je ne puis dire que j'ai fais de bonnes actions, ce serait me vanter et le seigneur n'aime point cela. Du reste, je me contente de faire ce qui doit être fait. Le seigneur n'a-t-il pas dit, ce que vous faîtes à l'un de mes frères ou de mes sœurs, c'est à moi que vous le faîtes ? Je m'efforce de rendre au christ ce qu'il a fait pour nous, ni plus ni moins. Et il n'y aura pas trop de vivres je puis vous le garantir. Ces gens ont faim. Quand bien-même il resterait quoi que ce soit, c'est à eux que nous le redistribuerions , pour demain. Mais je vous remercie pour cette délicate attention. Alors... qu'elles sont donc les nouvelles que vous m'apportez ?»

Déjà elle reprend sa tâche, ne prend pas le temps de s'arrêter, ne prend pas le temps de prendre une pause, enjoignant alors son interlocuteur à la suivre, dans les cuisines où son habit détonne clairement. Rapidement, les mains couvertes de farine, la jeune femme recommence à préparer des pâtes à pain alors que le fournil tourne à plein régime, tandis que de part et d'autres de la cuisine, d'autres sœurs épluchent les victuailles apportées à l'instant pas monsieur Downcry, pour préparer les légumes.

Elle ne lui en voulait pas. Après tout la jeune sœur avait consciente que, tout chef de police soit-il, monsieur Downcry avait désormais atteint un certain âge. Et courir ne devait plus lui être aussi facile, aussi aisé, que lorsqu'il avait vingt ans seulement. Peut-être que la jeune femme aurait été plus rapide. Mais que peux faire une femme dans les rues de Londres, face à un voleur ? L'homme aurait eut tôt fait de prendre le dessus sur elle, même si elle l'avait rattrapé. Et elle en doutait fortement car le voleur avait été rapide et, si elle pouvait potentiellement courir plus vite qu'un homme de cinquante ans, elle doutait d'avoir les mêmes capacités face à un homme d'une vingtaine d'années, même diminué par la faim.

Comme cherche ses bourses, la jeune femme tente de l'en dissuader, considérant que ce dernier n'a pas à faire les frais de ce larcin. Pourtant cet argent ferait le bonheur de quelques nécessiteux c'est vrai. Alors quand l'homme lui donne finalement cette monnaie, la sœur ne proteste pas plus longtemps, en le remerciant de son présent et se promettant d'aller le distribuer dès le lendemain. Rapidement de toute façon, l'argent n'est plus une priorité alors que l'homme semble mal en point et la demoiselle s'en inquiète. Mais ce n'est que la vieillesse, comme il le lui fait remarquer avant de proposer de la raccompagner au couvent. Il est vrai qu'avoir une escorte serait plus sûr, mais elle se sent désolé d'exiger cela de lui.

«- Si vous êtes fatigué Monsieur Downcry, il conviendrait davantage de rentrer chez vous pour aller vous reposer, je saurais être prudente.» répond finalement la jeune femme. «Le couvent n'est guère loin, j'y serais rapidement et probablement sans encombres. » répond finalement la demoiselle avec un sourire, de sorte à le rassurer.