Salus ægroti suprema lex [pv David]



 
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Salus ægroti suprema lex [pv David]

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MessageSujet: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeDim 14 Mai - 19:15


Salut aegroti suprema lex

« La santé du malade est la loi suprême »

Courant 1890

La tranquillité ne daignant pas arriver sans quelques remous, il fallut que le docteur Ashton Fowler vînt à mourir d’une brusque crise cardiaque et cela bien évidemment sans successeur pour reprendre son cabinet au sein de Lambeth. Si l’empathie de Johan daignait être supérieure à celle d’un caillou, il lui fallut tout de même quelques minutes pour réaliser que la disparition de ce charmant médecin quincagénaire, en plus de lui être pénible, allait certainement lui causer un manque dans sa solitude vénérable. Il était rare aujourd’hui de pouvoir jouxter avec une telle personnalité sans se trouver confronter à de pires ennuis. Cela bien sûr ajouté au fait que le docteur Fowler n’était point trop regardant sur sa consommation d’antidouleurs du moment que le jeune notaire s’occupait de ses affaires.

« La liste d’attente de quelques spécialistes des hauts quartiers ne sera pas pour vous plaire, m’sieur Johan. » Avait ainsi commencé Félix, désireux de ne pas trop le fâcher sans pour autant le ménager. Et installé dans son cabinet, la jambe de bois étendue devant lui et les reins souffrants le martyrs de ses douleurs quotidiennes, Johan avait sifflé entre ses dents.

« Je me refuse à aller plus bas que Lambeth. Trouvez moi un médecin, soudoyez le s’il le faut mais je veux un homme de mérite et pas ces charlatans qui exploitent la plèbe. »
« J’vous proposais pas cela mais à défaut d’avoir quelqu’un et vu votre état, m’sieur Johan… Le mieux c’est encore l’hôpital. Et on m’a donné l’nom d’un homme qui y officie. Paraîtrait qu’il fait bien son travail. »

L’hôpital. De quoi le crisper encore plus que cet aléa déplaisant qu’était la mort de Fowler.

« Si cet imbécile avait pu attendre deux semaines… »
« J’doute que ça s’commande, si j’puis me permettre m’sieur Johan. » L’accent français de Félix ressortant un peu plus lorsqu’il était nerveux, Johan prit sur lui d’épargner ses oreilles en cessant ces tracasseries infantiles, presque disposé à se lever.

« Eh bien soit ! L’hôpital ! Mais si l’un de ces traînes-misères s’en vient tousser à mes oreilles je ne réponds plus de moi. »
« C’est prévenu m’sieur Johan. »


***


En vérité, le St Bartholomew's Hospital n’était pas aussi mal fréquenté que Johan le prétendait mais Withers oblige, il lui arrivait parfois de manquer de rationalité concernant son quotidien pour le simple plaisir de cracher son mécontentement comme un chat sur lequel on aurait marché. Quittant le fiacre, la démarche pénible, ce fut au plus lent qu’il s’infiltra dans l’établissement, redirigé à l’accueil vers le service du chirurgien qu’il voulait rencontrer, peu disposé à piétiner dans la salle d’attente en compagnie d’autres malheureux.

Déjà épuisé, les yeux gris injectés de sang, ce fut donc encapé, le chapeau entre les mains de Félix et la canne tremblant au bout de sa main que Johan se présenta au bureau du Docteur David P. A. Williams, laissant son aide frapper pour lui à la porte fermée avant de la lui ouvrir sans autre forme de procédé.

« Attendez-moi là Félix. » Ordonna alors Johan dans un chuintement de voix, la mâchoire crispée par les vagues successives de douleur provenant tant de son dos, de ses cuisses, de ses tempes et de son absence qui, comme au jour de ses 14 ans, semblait pourtant une énième fois brisée. « Docteur Williams ? » Questionna-t-il avec humeur sans paraître pour autant aussi suffisant qu’il le pouvait. « Permettez d’excuser cette exigence mais comme l’on dit certainement au sein de votre corps médical, c’est une urgence. »



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David P. A. Williams
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Informations : Est né en Écosse. • Vient d'une famille de petits bourgeois. • Son père est pasteur. • A été abusé par sa mère pendant plusieurs années. • Santé fragile. • A passé quelques semaines à l'asile à cause de son homosexualité. • A un très fort caractère. • Arrogant parfois. • Se drogue. • Fume occasionnellement. • A tenté de suicider. • En a conservé les cicatrices sur son avant-bras. • A des marques de piqûre au niveau du coude.
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MessageSujet: Re: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeMar 16 Mai - 23:42



Salut Aegroti Suprema Lex.

« SKILLS IN PILLS »

St Bartholomew's Hospital, 1890.

David se trouvait dans son bureau depuis quelques heures maintenant. Il n’avait été étrangement pas dérangé depuis un long moment, comme si plus personne ne s’était blessé dans Londres et que tous les patients de l’hôpital avaient mystérieusement guéris. Bien sûr, cela était totalement faux, les autres médecins n’avaient juste pas eu recourt à ses compétences dans l’immédiat. Mais cela ne déplaisait absolument pas le jeune chirurgien, qui profitait du calme de son bureau depuis les récents évènements de sa vie : la rencontre avec ce vétérinaire et les retrouvailles avec Fergus. Il devait avouer que tout ceci l’avait un peu secoué et, David, qui avait un caractère assez lunatique, était de mauvaise humeur depuis quelques jours, comme quand il lui arrivait quelque chose de bien. Oui, tout ceci était très paradoxal, David en était lui-même conscient mais il n’y avait malheureusement pas grand-chose à faire. Son esprit était malade et maladif, sans aucune chance de rémission, et le chirurgien ne faisait qu’aggraver les problèmes de son cœur en jouant entre l’opium et autres drogues addictives. Seulement, il n’y avait pour lui aucun moyen de s’en échapper et il n’était pas sûr que sa rencontre avec Harry Downcry change quoique ce soit.

Bref, là n’était pas le propos. Il essayait pour l’instant de profiter de ses instants de tranquillité pour mettre de l’ordre dans son bazar. Étrangement, il parvenait pour l’instant à retrouver tous ses documents importants, bien que cela ne soit pas flagrant au premier regard. Il avait en effet remarqué le regard médusé de ses patients devant la paperasse qui s’amoncelait sur le meuble en bois foncé et il en avait déduit que ceci ne donnait pas une bonne image de lui. Ou du moins, une image suffisamment positive pour qu’il en soit satisfait. Il avait besoin de ranger, c’était indéniable. Cependant, sa solitude chérie fut de courte durée, interrompue alors par des frappes à sa porte avant de voir celle-ci s’ouvrir. David retint un soupir agacé quand il vit un jeune homme, qui ne devait même pas avoir la vingtaine d’années, entrer sans plus de politesse dans son bureau. Méfiant, David s’arrêta dans son geste, un dossier fourni dans les mains. Il inspecta rapidement l’individu. La première chose qu’il remarqua, bien évidemment, fut la canne du jeune homme ainsi que sa jambe de bois. Il ne fit aucun commentaire cependant, se contentant de poser ses documents sur son bureau.

Quand le nouvel arrivant sollicita l’intervention urgente du chirurgien, David soupira profondément, essayant d’anticiper la demande de son désormais patient.  Son moignon le faisait souffrir, la prothèse frottant avec sa peau et lui rentrant même dans le bout de jambe qu’il lui restait quand il se tenait debout. David en avait vue, des estropiés, et tous avaient à peu près la même chanson. Il se passa rapidement la main sur le menton et eut un sourire quelque peu arrogant quand il vit qu’il n’y avait sur le garçon aucun signe de blessure qui nécessitait une intervention urgente du chirurgien, remarque qu’il s’empressa d’ailleurs de faire de vive-voix :

— Je ne vois pas ce qu’il y a de si pressant quand je vous regarde. Pas d’hémorragie à vue d’œil… Pas de perte d’équilibre non plus, apparemment… Enfin, mis à part votre jambe.

Il eut un petit sourire et se leva. Non, David Williams n’était vraiment pas de bonne humeur ce jour-là, comme depuis plusieurs mois seulement. Personne n’avait la réelle explication pour justifier un tel caractère, pas même lui, mais malheureusement, les faits étaient là : il venait une nouvelle fois de répondre à un patient sans la moindre trace de respect et de joie dans la voix. Il soupira cependant et se leva pour s’approcher de l’infirme afin de le voir de plus prêt. Il le regarda de haut en bas avant de flanquer son regard bleu dans celui de son patient.

— Alors dites-moi, qu’est-ce que je peux faire pour vous ?

Il lui tourna le dos et retourna vers son bureau tout en disant :

— Retravailler le moignon ? Vous donner des antidouleurs ?

Il se tourna alors vers lui, derrière le bureau cette fois-ci, la fenêtre dans le dos, et renchérit :

— À moins que cela n’ait aucun rapport avec votre jambe.

Il eut alors un sourire presque bienveillant, bien qu’un peu coincé voire même forcé. Oui, tout était encore très paradoxal.
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MessageSujet: Re: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeMer 17 Mai - 19:12


Salut aegroti suprema lex

« La santé du malade est la loi suprême »

Courant 1890

L’arrogance. De la part d’un chirurgien d’hôpital, cela avait au moins le mérite de lui couper brièvement le sifflet. Mais loin de se formaliser voire même de claquer la porte sur ce genre de comportement, ce fut bien cette attitude qui ferra Johan à ce bureau, laissant son regard s’ancrer à celui du médecin, sans tressaillir à ses questions, sans même grimacer des doutes supposés sur son « urgence ». Vraisemblablement, cet homme-là n’était pas du genre à vous caresser dans le bon sens du poils, à minauder pour la clientèle comme un couturier empressé de vous vendre ses services – Brett aurait très certainement trouvé une métaphore mieux appropriée à base de putain.

Il ne faisait pas le faux, mais il faisait le fier.

« Primum non nocere. » Claqua dès lors Johan dans un latin parfait avant de claudiquer jusqu’à la chaise – non pour s’asseoir, l’assise trop raide lui aurait broyé les lombaires plus que sa position debout – mais pour s’y appuyer légèrement de l’autre main. Laissant ainsi sa maudite prothèse gagner quelques centimètres de liberté par rapport au sol.

« Et si vous pouviez commencer par ne pas nuire à mon moral, je vous en serais gré, docteur. » Un sourire implacable fleurit sur son visage. « Le moignon n’a pas besoin d’être retravaillé. Voilà bien quatre ans qu’il demeure ainsi et je me targue de lui laisser une paix royale, malgré ce qu’il me fait subir. Certes la prothèse pourrait être mieux ajustée mais les récents modèles n’assouplissent en rien la douleur qui est ma principale priorité aujourd’hui. »

Malgré son air de diva un peu pincée comme sa diatribe étonnement courtoise malgré ses sarcasmes et son ton quelque peu mordant, la sueur humectant sa lèvre supérieure, toujours imberbe, trahissait inévitablement son mal. Son mal du mal. Cette douleur atroce lui faisant plier la colonne vertébrale et le mettant dans l’inconfort à chaque mouvement de son maudit corps.

« C’est tout le reste qui pose problème, cher docteur. Je claudique, je m’appuie, mon épaule proteste, ma nuque se raidit, mon dos s’affaisse, mes reins se tordent et tout m’apparaît comme immanquablement fioutu. » L’injure. Si Félix avait pu l’entendre, de l’autre côté de la porte, nul doute qu’il aurait saisi en premier la gravité de la situation. Johan ne versait pas dans la facilité ordurière du langage. Il pinçait et chatouillait mais ne rongeait pas comme un rat.

Il piquait comme une pie. Et empalait de même au moment opportun.
Et sans chouineries.

« On m’a confié votre nom en me promettant avoir à faire à un spécialiste compétent. Je ne suis pas ici pour la poésie et encore moins pour vous plaire. Soignez-moi et vous serez payé. Non mieux. Soignez mieux et au plus vite je partirais. Cela me semble un parfait compromis. »

Ceci dit, quelques antalgiques ne seraient pas de trop pour commencer les festivités mais se refusant à implorer ce genre d’offrandes, Johan se contenta de redresser le menton, haussant un sourcil presque défiant face à l’inhospitalité du praticien.

Mais au moins la joute verbale avait pour mérite de le distraire.



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MessageSujet: Re: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeSam 10 Juin - 9:39



Salut Aegroti Suprema Lex.

« SKILLS IN PILLS »

St Bartholomew's Hospital, 1890.

Le jeune homme s’avança en boitant dans le bureau de David, prononçant une petite phrase en latin tandis qu’il marchait. « D’abord ne pas nuire. » De par l’éducation religieuse de son père, l’apprentissage de cette langue morte avait été une priorité pour lire les textes saints mais surtout comprendre les messes et autres offices religieuses. Cependant, même s’il savait ce que cela voulait dire, il ne sut pas tellement à qui le jeune homme s’adressait. À lui-même car David avait pu lui titiller l’orgueil dès le départ ? Ou au chirurgien lui-même ? Se connaissant, la deuxième proposition était parfaitement crédible mais il doutait sérieusement que son patient improvisé en sache autant. Il le regarda alors s’appuyer sur le dossier de la chaise en face du bureau. L’inconnu lui demanda alors avec le sourire de ne pas être trop dur avec lui, ce à quoi David répondit avec un simple sourire. Il lui indiqua alors que le moignon n’était pas le problème direct. Ou indirect. Enfin que le moignon était la source de ce problème mais qu’on ne pouvait rien y faire. David baissa naturellement un regard vers la jambe estropiée de son patient, pensif. Il soupira doucement et se pinçant le menton pour réfléchir.

L’inconnu poursuivit, continuant d’exposer son problème et David ne sut pas trop s’il se moquait de lui ou s’il était sérieux. Il était en effet en train de lui dire que son corps avait dû mal à compenser la perte de sa jambe, que le dos, la nuque, tout était affecté par cette amputation. Le chirurgien releva les yeux vers lui, sans bouger un muscle, l’air sérieux. L’homme parla alors de le payer ou même de partir au plus vite mais David ne broncha toujours pas, réfléchissant à ce qu’il pouvait bien faire pour ce pauvre garçon. Évidemment qu’il souffrait. Cela se voyait à la sueur qui perlait sur son front. Le chirurgien soupira profondément avant de s’asseoir dans son fauteuil, tout en continuant de le regarder dans les yeux. Il n’avait toujours pas donné de réponses mais il aimait prendre son temps. De toute façon, il réfléchissait à un éventuel moyen de soulager la douleur de son patient. Il y avait bien le laudanum, encore une fois, incontournable antidouleur de l’époque, mais les effets secondaires étaient nombreux. Cependant, vu la peau pâle du monsieur, il se doutait bien qu’il n’était plus à cela prêt. Il soupira et prit la parole :

— Tout d’abord, je tenais à vous dire que je ne pourrais vous faire repousser votre jambe, cela va de soi. Et il est normal que votre corps endure des souffrances et il n’y a malheureusement pas grand-chose à y faire.

Il marqua une pause, regardant son bureau avant de le regarder de nouveau.

— En revanche. Je peux peut-être vous donner quelque chose qui stabilisera votre dos. Une ceinture lombaire, un peu améliorée, vu que votre douleur remonte jusqu’à la nuque. Cependant, je n’en ai pas là tout de suite et encore moins à votre taille ou pour votre cas.

Il fit une pause, ouvrit un tiroir de son bureau et en sortit une fiole de laudanum. Il le posa sur la table avant de la pousser avec nonchalance.

— Ce que je peux faire maintenant, c’est vous prescrire ceci. Vous avez sûrement dû en entendre parler. Si ce n’est pas le cas, je ne sais pas où vous avez traîné toutes ces années… Quoiqu’il en soit, c’est à base d’opium et d’alcool, vous imaginez sans doute la potentielle addiction qu’on peut avoir à trop fortes doses. N’en abusez pas, mais bon ça vous regarde après.

Comme ça ne regardait que lui sa propre addiction à ce médicament. Parfois, il avait l’impression d’un marchand de drogue alors que le laudanum n’était rien de plus qu’un simple médicament efficace. Il soupira avant de reprendre.

— Je peux vous en prescrire si vous voulez. Ah et il me faudrait votre nom aussi.

Il sortit un papier et une plume, prêt à écrire, regardant son patient dans les yeux.
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MessageSujet: Re: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeDim 11 Juin - 18:10


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« La santé du malade est la loi suprême »

Courant 1890

Finalement, il valait mieux effectivement que Félix ne revienne pas et ne soit pas le témoin de ce nouvel échange. Étrangement posé, le chirurgien fut soudain tout à son office, détaillant son bureau avec une attention presque hésitante, laissant comprendre à Johan qu’en ses pensées se jouaient une bataille sévère entre envie de guérison et risques inutiles. La gorge soudain sèche, sans plus faire le malin, le boiteux demeura calme et silencieux, attendant l’avis médical qu’il prit avec grand soin. S’il passa sur l’évidence d’une impossible guérison, ses sourcils se haussèrent avec un brin de scepticisme quand David évoqua la ceinture lombaire.

« Cela ne serait-il pas ridicule ? » Questionna-t-il avec soin, soudain embarrassé de la bassesse de son propos mais à la simple idée qu’on puisse le trouver en corset de demoiselle, son visage rougissait, comme tâché de vin, aussi honteux que – non, il ne le dirait pas. « Une ceinture ne fera que maintenir mon dos n’est ce pas, cela ne sera pas plus… » Plus embarrassant ou plus visible qu’un vêtement de jeune fille.

Félix l’aidait à s’habiller le matin. Au moins regard rieur de ce dernier s’ajouterait la rage habituelle de son maitre d’avoir été ainsi humilié. Mieux valait pour eux tous que personne ne parvienne à savoir, deviner, et par conséquent se moquer.

Mais le tiroir s’ouvrit et les pensées de Johan s’effacèrent sur ces considérations presque futiles. Le regard gris s’attarda sur la ligne idyllique de la fiole de laudanum et tandis que son cerveau prenait le voile d’un blanc salvateur, sa bouche s’emplit de fer, comme de sang.

Opium et alcool. Bien sûr qu’il connaissait. Si le premier lui était refusé pour des raisons évidentes de légalité, le second lui avait été fortement déconseillé par l’ensemble des praticiens consultés. Dans son état, une addiction ne pouvait que lui être terrible mais le mal – oh son mal – ne lui permettait pas de trouver le repos. Et tous savaient à quel point le sommeil était salvateur pour le bien-être des concernés.

« Mon aide se chargera des doses pour que je n’en abuse pas. » Mais Félix était diablement influençable lorsque Johan parvenait à se montrer convaincant et hélas, il était très souvent. Seulement, son esprit se rasséréna de ces fausses excuses et son visage glabre dessina un sourire poli. Aimable et engageant, pour une fois.

« Johan Withers. » Si son influence demeurait médiocre, son nom suffirait peut-être à apporter à ce docteur quelques bénéfices en échange de cette dro-médicamentation. C’était à réfléchir sérieusement.

« Et je vous suis gré de votre professionnalisme. Il me semble effectivement qu’il ne me reste, dans mon cas douloureux, que cette solution. Si vous pouviez m’en prescrire quelques doses, pour que je n’ai pas à vous re-déranger dans les semaines à venir, cela serait fort aimable de votre part. »

Son esprit appela à l’aide. Exigeant soudain une piqure, ici, comme une brusque poussée de désir. Mais la raison l’emporta sur l’envie. Nul n’avait à le voir perdu dans les limbes de ces descentes au parfum de coquelicot. Nul n’avait à constater sa faiblesse et à le voir repartir d’un pas, déjà boiteux, mais aussi clairement évadé.

Nul n’avait à venir traverser ses rêves. Jamais.



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MessageSujet: Re: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeDim 11 Juin - 21:33



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« SKILLS IN PILLS »

St Bartholomew's Hospital, 1890.

David haussa les sourcils quand son patient lui demanda si le port de l’étrange ceinture ne serait pas un peu ridicule. Le chirurgien devait avouer que cette remarque le prit au dépourvu et que cela le conforta un peu plus dans son idée que l’homme en face de lui se foutait de lui. Il avait mal et voulait se soigner ou pas ? De plus, il semblait évident que ce corset se trouve en-dessous des vêtements. Car l’appareillage était relativement visible et il était facile de deviner que cela était lié à un problème de dos. De plus, le jeune homme était déjà suffisamment visible avec sa démarche boiteuse et sa jambe de bois, il était inutile de lui rajouter un détail visible. Mais apparemment, ce ne fut pas si évident pour lui. David préféra garder le silence cette fois-ci. Il sentait que sa patience, qui était déjà très limitée de base, commençait à être épuisée et que la remarque tranchante et presque agressive pouvait venir d’une seconde à l’autre. Il se contenta donc d’un profond soupir désespéré et secoua sa tête, le regard exaspéré. David se demandait encore comment les gens pouvaient arrivaient avec arrogance dans son cabinet pour avoir autant de connaissances qu’un nourrisson.

L’homme lui promit de ne pas abuser du médicament car son « aide » veillait sur lui. Le chirurgien haussa les épaules. Peu lui importait ce qu’il faisait avec le laudanum. Il était pour soulager sa douleur ou le soigner d’une maladie, d’un virus ou d’une blessure. Pas là pour régulariser les doses de son patient s’il n’est pas hospitalisé. De plus, malgré les traits juvéniles de son visage et le fait qu’il semblait sortir tout juste de l’adolescence, il avait une certaine maturité sur lui, à moins que ce ne soit que de l’arrogance. David ayant lui-même son petit ego, il ne voulait en aucun cas s’attarder avec quelqu’un comme lui. Donc il estimait, avec plus ou moins de négligence, que Johan Withers serait apte à être autonome et raisonnable dans ses doses de laudanum. Il lui demanda une prescription, ce à quoi David répondit par un hochement de tête affirmatif. Il prit donc son papier et griffonna dans une écriture digne d’un médecin, les quatre fioles de laudanum. Il regarda sa feuille avant de le lui tendre, plongeant ses yeux bleus inexpressifs dans les siens. Attendant qu’il le prenne, il dit sur un ton neutre :

— Je vous ai donné quatre fioles pour le mois. Vous irez les chercher en bas. Ne revenez pas dans deux semaines en me disant que vous avez déjà tout fini, s’il vous plaît.

Il marqua une pause avant de poursuivre :

— Prenez des petites gorgées aussi, maximum deux fois par jour. Cela vous tiendra plus longtemps et croyez-moi, c’est efficace.

David était l’un des mieux placés pour en parler après, en consommant régulièrement au point d’en développer une certaine addiction, faute à sa santé plus qu’aléatoire. Il soupira et reprit croisant les doigts, les mains posées sur le bureau, lui donnant un air sérieux et solennel, continuant de le fixer.

— Et Mr. Withers, le corset pour votre dos se porte sous vos vêtements. Pas par-dessus. Je me doute bien que ce ne soit pas le meilleur accessoire pour courtiser ces dames et c’est donc prévu pour être porté caché. Ne vous en faites pas.

Il tenta un sourire bienveillant, qui semblait plus crispé et sarcastique qu’autre chose.
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MessageSujet: Re: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeDim 16 Juil - 18:17


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« La santé du malade est la loi suprême »

Courant 1890

Malmené par ses impératifs physiques, Johan tâcha de réguler son souffle pour ne pas se trahir et achever, dans son embarras, par un brusque éclat de colère qui ne leur aurait été d’aucune utilité. Constatant pourtant toute l’étendue de son ignorance concernant les soins médicaux, il prit un soin tout particulier pour exprimer son mécontentement face au mépris du médecin, le regard soudain plus ombragé. Pourtant une question le taraudait.

La manière dont le médecin avait pu lui prodiguer ses conseils quant au Laudanum laissait sous-entendre une connaissance plus particulière vis-à-vis de ses possibles addictions. En tant que praticien, il avait certainement dû être confronté aux terribles dépendances de ses patients mais quelque chose clochait. Comme l’éraflure discrète mais présente d’une broche mal enfoncée.

« Ne vous forcez pas à être aimable. Votre rictus, faussement aimable, est une tâche de vin dans votre discours. Vous êtes sarcastique, hautain, détaché et solitaire, cela se sent. Je ne peux critiquer ces qualités. » Sa langue claqua néanmoins sur son palais.

« Et comme envers une tâche, il nous arrive parfois d’avoir l’impression d’être d’une complète transparence vis-à-vis des choses qui nous impactent. Et c’est très exactement mon impression avec votre ceinture lombaire. L’idée qu’on puisse la deviner, même à travers mes costumes cintrés. Mais il est vrai que je n’avais pas pensé à la porter à même la peau… comme l’habit dont il est inspiré. » Avoua-t-il simplement un ton plus bas avant de jouer des épaules, tâchant de se détendre.

Le tremblement de sa main droite plus symptomatique que somatique, lui rendit la paume moite.

« Des petites gorgées deux fois par jour, n’est-ce pas ? C’est extrêmement précis. Vous devez être un praticien de renom pour posséder une telle connaissance sur les diagnostiques et les médicamentations à prescrire à vos patients. Ca, ou pertinemment conscient de ses douloureux effets. Je ne vois pourtant aucune blessure physique, aucun membre amputé… je pencherais donc pour la première solution mais entre vous et moi, et puisque votre conscience méticuleuse semble avoir deviné mon intérêt en venant vous voir et en concédant l’aval de cette drogue… Il y a autre chose, n’est ce pas ? »

Son intérêt sembla soudain bien plus aiguisé par cette possible solution, improbable mais charmante au demeurant, que par sa douleur et le mal disparaissant peu à peu sous l’attention portée au docteur Williams, Johan se pencha un rien en avant.

« Votre tombeau est mon tombeau, comme disent les égyptiens. Il n’y a rien qui vous engage plus que cela ne m’engage moi, en tant que notaire. La loi est belle et bien formelle vis-à-vis du Laudanum en tant que distraction et une prescription m’engage à certaines responsabilités facilement vérifiables, comme vous l’avez si habilement sous entendu en me conseillant de ne pas revenir vous voir trop fréquemment. Alors si vous voulez vous confondre en un masque honnête, je vous encourage à une prompt vérité. »

Puis son sourire, rictus semblable à David, se figea de bien-être et de politesse feinte.

« S’il vous plait ? » Et en français.
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MessageSujet: Re: Salus ægroti suprema lex [pv David] Salus ægroti suprema lex [pv David] Icon_minitimeJeu 27 Juil - 9:05



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« SKILLS IN PILLS »

St Bartholomew's Hospital, 1890.

L’interlocuteur de David partit dans un monologue dont le chirurgien ne comprit pas l’intérêt. Que cherchait-il à faire exactement ? Démonter ses arguments pour la ceinture lombaire ? Essayez de lui extirper des informations sur sa vie personnelle ? C’était bien la première fois que David voyait un patient si effronté, notaire ou pas. Il lui avait aussi recommandé de ne même pas se forcer à être aimable et il n’allait vraiment pas se faire prier. Il n’avait autre chose à faire que de perdre du temps avec ce gosse sûrement déjà bien imbu de lui-même. Il avait beau être relativement mignon (bien que pas son style), David ne supportait pas les fortes têtes qui étaient si jeunes. Surtout que, concrètement, dans le cas présent de Mr. Withers, fanfaronner et jouer sur la patience des nerfs lorsque l’on était estropié n’était pas forcément une bonne idée. Certains avaient la morale suffisante pour ne pas frapper sur un handicapé mais certains s’en fichaient juste complètement. David s’étonna d’ailleurs qu’il n’ait pas de marque de coup quelconque. Car il y avait quelque chose de sournois en lui, quelque chose qui ne lui plaisait absolument pas, sans qu’il ne sache dire encore pourquoi.

Mais étrangement, David n’avait nullement envie de savoir. Si cet homme venait prendre son laudanum sans rien dire et partait sans plus de manière et de mots envolés, cela ne pouvait que convenir au chirurgien. Il n’était pas contre prescrire des antidouleurs, mais il était en revanche beaucoup plus contre l’interrogatoire que son patient menait. Était-il une sorte d’inspecteur sous couverture de Scotland Yard ? Dans ce cas-là, il manquait cruellement de tact et c’était fait griller. En revanche, s’il était bien notaire comme il l’avait dit lui-même, il ne comprenait pas son besoin de savoir d’où venaient les connaissances qu’avait le chirurgien sur le laudanum. Aussi garda-t-il son sang-froid. Il ne comptait de toute façon pas déballer sa vie privée à ce garçon venu d’il ne savait où avec sa démarche boiteuse. Il resta donc droit et fier et se permit même un demi-sourire arrogant. Mr. Withers lui avait demandé de ne pas se forcer pour être aimable, il n’allait alors par se faire prier et écouter ses « précieux conseils ». Le jeune homme s’avérait être tout aussi sarcastique que lui et cela ne lui faisait pas peur de s’attarder dans une joute verbale qui se rapprochait plus du combat de coq en vérité.

— Je vais vous le dire franchement : cela ne vous regarde pas, il me semble. Le laudanum est un produit légal, surtout dans un but médical. Plutôt que de mettre votre nez là où il n’y a aucune raison qu’il y soit, estimez-vous plutôt heureux que votre médecin connaisse son sujet. J’en invoquerai aussi au secret médical, qui marche dans tous les sens qu’on veut à peu près. Je n’ai pas le droit de parler de vous à qui que ce soit et rien ne m’oblige à déballer ma vie privée. Vraiment, je ne vois pas pourquoi je vous en parlerai. Après, vous pouvez toujours aller voir un autre médecin, mais il ne faudra pas venir râler parce qu’il sera un peu moins généreux sur les doses. Personnellement, je vais vous poser une question : qu’est-ce qui est le plus important pour vous ? Votre orgueil proéminent d’adolescent ou la douleur qui semble vous ronger jour après jour ?

Il continua de le regarder froidement dans les yeux, menton relevé, et finit par lâcher :

— Mais je reconnais bien l’enfant arrogant qui fait des conclusions hâtives sur des sujets qu’il ne maîtrise absolument pas : toutes les douleurs ne sont pas forcément visibles ni extérieures. Sur ce, je vous encourage à vous poser les bonnes questions avant de parler et de laisser les gens faire leur métier.

Il eut un sourire sarcastique, presque mauvais, soutenant toujours son regard.
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