Jolie petite histoire...



Rien n’était jamais trop beau, trop raffiné pour la table familiale des Borinski, où chaque soir, pratiquement, se rassemblait la fine fleur de la société pétersbourgeoise. L’on y discutait politique, culture, chacun commentait la saison passée ou en cours et ces tablées étaient souvent le décor d’annonces diverses: fiançailles, nominations à des postes clés, aucun sujet n’était oublié - mis à part peut-être la question religieuse, tacitement bannie de toutes les conversations convenables.  La pureté du cristal dans lequel les convives buvaient n’avait d’égal que la délicatesse des mets qui se succédaient à une cadence lascive mais régulière: potages, turbot sauce riche, buissons de homard à la ravigote. Généralement, les quantités étaient plutôt réduites, l’on préférait la qualité à l’abondance, devenue synonyme de prétention, d’un besoin d’affirmation, et Vassili Borinski avait atteint un âge où il n’avait plus rien à prouver. Il arrivait toutefois, pour des visiteurs particulièrement illustres, lorsque par exemple, le tsar Alexandre II honorait la demeure familiale de sa présence, que les vieilles traditions médiévales soient, le temps d’une soirée, réhabilitées. Artyom, jeune garçon à lors, n’avait pas eu le privilège de dîner à la même table que le souverain, mais il connaissait les moindres détails de ces soirées comme s’il les avait vécues. Elles étaient la fierté de sa mère, dont les seules réelles consolations dans un mariage malheureux, se résumaient à organiser et donner, dîners et réceptions.
Futé et observateur, Artyom avait compris très tôt que ses parents ne s’aimaient pas; il ne savait pas les détails de l’histoire, et s’était efforcé de se souvenir d’occasion où il y avait eu ne serait-ce qu’une once de tendresse entre eux. Bien sûr, il avait reçu de sa mère tout l’amour qu’un fils peut espérer, et elle avait toujours dans le regard, cet éclat presque béat, empli de fierté, lorsqu’elle le regardait. Son père, quant à lui, lui était toujours apparu comme une figure de de dignité et d’honneur, faisant front et prenant les devoirs que lui incombaient son rang avec élégance. Jusqu’au jour où tout finit par basculer.


Tous s’affairent dans ce qui semble être une agitation fébrile, mais en réalité personne n’est nerveux; chacun sait exactement ce qu’il a à faire pour que tout se déroule du mieux possible. Il ne sais pas quelle heure il peut bien être, mais une chose est sûre, ça fait de longues heures qu’ils sont à l’oeuvre, et les deux infirmières épongent avec douceur le front perlé de sueur de la jeune femme allongée là, les jambes repliées vers elle-même. Les manches retroussées, il demande de nouveaux linges propres et aussi à ce qu’on ouvre la fenêtre, sous l’oeil un peu revêche de la vieille gouvernante. Dans la pièce voisine, il sait que les autres hommes attendent avec anxiété, guettant le moindre cri, les sens à l’affût d’un pleu de nouveau-né. Le miracle ne s’est pas encore produit, mais ça ne saurait tarder; l’agitation commence à poindre. Finalement, le corps tout fripé s’extirpe du cocon. Il le réceptionne, les gestes précis et assurés, tant de fois répétés. Le premier cri ne se fait pas attendre, et le premier bain attend déjà celui qu’on a déjà destiné à la Chambre des Lords, comme son père. L’examen post-natal sitôt effectué, il donne les dernières instructions aux infirmières qui resteront pour la nuit. - Au moindre signe de fièvre, faites moi appeler. Répète-t-il fermement avant de saluer la famille immédiate et de s’effacer. C’est loin d’être la première fois, mais inlassablement, une bouffée de plusieurs sentiments mélangés l’envahit. Le corps humain ne cessera jamais de l’émerveiller et dans ces moments là, d’une certaine façon, il n’est pas mécontent du tournant qu’a pris sa vie sept ans plus tôt et quelques milliers de kilomètres à l’est.

La nuit est tombée sur les rues de Londres. en rentrant dans son appartement juste derrière Soho, il a trouvé le pli et un sourire a étiré le coin de ses lèvres. L’écriture est irrégulière, il soupçonne que ces quelques lignes ont été griffonnées avec comme seul support, les courbes d’un postérieur masculin, car il sait que c’est son territoire, sa nation; le libertinage. il s’en amuse parce qu’il sait que la nuit est la seule gardienne de ce secret et qu'après tout quel peut être l’enjeu pour une veuve prématurée, que la fortune a mis à l’abris du besoin d’un remariage? Le sourire est fugace cependant, parce qu’il sait que son secret à lui est entre des mains bien plus capricieuses: les mains d’une amante éconduite et vengeresse.  Juste le temps de se laver et de se changer, il ressort à peine une heure après être rentré; la nuit sera courte. Elle sera courte et productive.
Il la retrouve à l’adresse indiquée, et la seule salutation est déjà une sentence. - Tu es en retard. Implacable, elle l’inspecte sans retenue, un sourire appréciateur aux lèvres. Sa voix est posée, son timbre de velours, et elle n’a toujours pas esquissé un mouvement; il sait qu’elle examine le périmètre. Ça a toujours été ainsi, elle échafaude les plans, choisit les cibles, il l’aide à exécuter en échange de son silence. Il prend ça comme un jeu, c’est le conseil qu’elle lui a donné, et il aurait mauvaise grâce à prétendre que ça ne l’amuse pas un peu. Dérober ceux qui dans un cadre un peu différent, ont été prompts à l’excommunier après la chute de son père, a un certain attrait, d’autant qu’ici, personne ne connaît vraiment la famille Borinski. Humble médecin le jour, tout neveu de diplomate qu’il puisse être, cambrioleur à la nuit tombée. Janus des temps modernes.

Dans la vraie vie, je suis...
Quel est ton pseudo ? Firebolt. Un mec ou une fille ? fille. Quel est ton âge ? xxvii Comment as-tu connu le forum ? via Bazzart je crois..  Un avis dessus : j'adore l'époque victorienne, alors forcément j'étais obligée de céder - et puis exploiter la psychose liée à Jack l'Eventreur, c'est la cerise sur le gâteau   As-tu un DC ? Non.. (pas encore   ) Pv/scénario/Inventé ? Inventé Code de validation : Validé par lil' Mel-Mel.

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<t>Richard Madden</t> → <y>Artyom Borinski</y>