Sujet: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Dim 4 Mar - 12:48
Alors que tout semblait plus ou moins stable dans sa vie - il n'était pas à l'abri d'une inspection de police, d'un client récalcitrant, ou d'une quelconque surprise qui rendait le quotidien moins ennuyeux - John avait l'intime instinct qu'il lui manquait quelque chose, pour compléter le tableau. Et de ses profondes réflexions, il en avait déduit qu'il était prêt à fonder une famille, et donc de trouver la femme qui lui donnerait les enfants qu'il espérait. Rosaline, bien sur, le comblait de sa compagnie, et il ne fantasmait pas sur une histoire d'amour avec sa future promise. Son caractère n'allait pas dans le sens des sentiments, mais dans des objectifs pratiques bien ordonnés, et contrôlés. Il tenait donc à ce que sa future épouse remplisse des critères très précis. D'une part, évidemment, puisqu'il avait retrouvé sa fortune, il aurait apprécié qu'elle lui apporte un titre de noblesse - une forme de vengeance contre le sort qui l'en avait privé. D'autre part, il la voulait de bonne composition, saine de corps pour porter ses héritiers, et d'un caractère qu'il lui serait facile de contenter, pour ne pas devoir craindre les efforts d'un lien conjugal. Le reste était secondaire... Même si l'hypocrisie dans sa recherche n'était pas de mise, et qu'il voyait sa promise assez attractive pour qu'il réussisse à l'honorer dans la couche commune, comme il se doit. Il n'avait jamais eu de problèmes de ce côté-là, mais il savait les catins capables de se rendre plus affriolantes que les demoiselles respectables, pour assurer le bonheur de leurs clients, lassés de ces figures austères et maternelles qu'ils côtoyaient dans leurs maisons.
A la manière dont sa mère avait vanté ses mérites, Ambrosine Bellamy avait toutes ses qualités, et correspondait donc aux attentes de John, si jamais la rencontre confirmait ces dires. Il avait donc été prévu que celle-ci ait lieu, avant d'arranger quoi que ce soit : ce n'était plus à la mode de ne pas consulter chaque parti, et ceux-ci entre eux, avant d'envisager une union, fusse-t-elle de commodité plutôt que de plaisir. Pour l'occasion de ces présentations en bonnes formes, le Wicker s'était bien préparé, afin de mettre ses charmes en valeur. Il n'avait pas besoin de beaucoup d'efforts pour cette cause, en vérité, car sa naissance, sans doute, lui avait donné des traits agréables, virils, et ses années à regagner son rang lui avait construits un physique à la hauteur de la force qu'il imposait, dans le milieu de la nuit où il exerçait la plupart de son autorité, pour subvenir aux besoins de son foyer, et plus encore. La banque d'Angleterre ne s'inquiétait plus de son compte, et il n'y entreposait pourtant qu'une partie de ses bénéfices, pour ne pas éveiller trop de soupçons, à travers les jalousies qu'il pourrait susciter, comme l'avait fait son père, et apprit à ses détriments.
- Mesdames, salua-t-il en s'approchant des Bellamy, à la sortie de la cathédrale, où le service venait de finir. Il fit une brève révérence devant la mère et la fille, qui avait du laisser le patriarche à ses propres fréquentations. L'aveu aurait été facile puisqu'il n'avait jamais croisé la jolie rousse auparavant : il n'était pas un fervent croyant, et ne se déplaçait jamais pour un office, à part s'il y avait à cela une bonne raison, comme ce jour. Je suis enchanté de poser enfin un visage sur tant de vertus qui m'ont été rapportées, ma chère Ambrosine, ajouta-t-il, en se tournant vers celle-ci, après l'obtention d'un signe encourageant de sa tutrice.
Elle était belle à regarder, auréolée d'une crinière flamboyante, et vêtue de ses plus beaux atours pour prier son Seigneur, et comme tous les hommes qui restaient dans le droit chemin de leur sexe sans doute, John n'y était pas totalement insensible. Il lui attrapa délicatement la main pour y déposer les lèvres, avec grâce, mais aussi quelque chose d'assez impérieux, qui ne tolérait que peu le refus. John Wicker avait l'habitude d'être obéi et cela ne faisait nul doute, à la manière dont il se comportait, et qui émanait de son port tout entier, qui différait indubitablement de celui de ses semblables. Il n'était pas un bourgeois que l'abondance de plaisirs avait voué à la coquetterie, ou à une complaisance malsaine. Il était fort, et tenait sa tête haute de l'orgueil de s'être forgé à la seule détermination de son esprit, et non d'un coup favorable du destin.
- M'accorderiez-vous le bonheur d'une balade en votre compagnie dans le parc, par cette belle journée ensoleillée ? Demanda-t-il, en essayant de cacher dans sa voix le ton sévère qu'il prenait souvent, pour donner des ordres à ceux qui l'entouraient, malgré lui. J'ai l'espoir de pouvoir faire avec vous plus ample connaissance, avant de... Et bien, nous avons surement beaucoup à apprendre l'un de l'autre, si vous me permettez de le découvrir.
Un coup d'œil à la pieuse Madame Bellamy l'avait fait hésiter. Ambrosine était-elle au courant des projets qui se tramaient autour de son futur mariage ? John avait cru ressentir quelques tensions autour du sujet, lorsque la famille l'avait abordé pour lui demander son concours, même s'il n'en avait pas immédiatement fait cas. Maintenant, il se questionnait sur le bien-fondé de ce malaise... Le prix de cette union était-il surfait ? Ambrosine présentait-elle un défaut bien caché, qui aurait pu dissuader les autres prétendants, et ne le laisser que lui, comme choix parental, pour relever le défi de ses tords ? Il allait surement bientôt le savoir, et évaluer objectivement s'il était capable ou non de passer outre... Après tout, son propre passé n'était pas si glorieux qu'il en fasse l'étalage, même s'il ne le niait jamais.
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Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Mar 13 Mar - 23:56
"Négociations maritales"
Ambrosine & John
Mère n’avait jamais été une excellente menteuse. Preuve en est que la bonne humeur dont elle fit preuve la matinée durant suffit à m’indiquer que quelque chose se tramait dans la maison, et ce, sans mon concours. Seul un aliboron se serait demandé de quoi il en retournait, décidée qu’elle était à l’idée de me trouver un mari – s’en était même devenu une blague récurrente auprès de ma couturière. De fait, elle m’avait une fois de plus commandé une nouvelle parure resplendissante pour ce jour et je devais avouer entretenir des doutes quand au fait que cela soit du à une volonté soudaine de me faire paraître sous mon plus beau jour dans la maison de Dieu – après tout ne cherchait-elle pas à m’abandonner dans les bras de l’un de ses messagers.
Si Mère s’agitait dans tous les sens, moi, je me préparais à toute éventualité alors que les heures passaient et que rien ne venait. Finalement, nous nous rendîmes au sermon en famille et je faillis presque perdre espoir alors que je ne voyais personne nous rejoindre ou même engager la conversation du temps que nous patientions sur les marches de l’Église que l’archevêque nous enjoigne à passer les portes. Je devais admettre en être presque désappointée : cette rencontre avait été une excellente excuse pour me montrer coquette un dimanche, ce que Mère ne cessait de me reprocher. De fait aujourd’hui, sa seule remarque fut de me rappeler d’enfiler mes gants avant de quitter la maison, sans quoi la réputation de la famille en souffrirait. Elle n’avait pourtant pas d’inquiétude à se faire sur ce sujet : parasol dans mes mains gantées, et manteau de fourrure sur mes épaules laissées découvertes par ma robe, je ne passais pas inaperçue auprès de la foule de jeunes hommes de la Communion. En observant les demoiselles autour de moi, je me félicitais d’avoir ajouté du rouge à mes joues – la décence ne m’aurait autorisé bien plus en ce jour sacré.
J’eus la confirmation que mon attention eut l’effet escompté lorsque je croisais enfin l’objet des doucereuses attentions de Mère, à la sortie de l’église. Moi même n’étais-je pas insensible à son charme. A vrai dire, Mère m’avait dégoté des laiderons bien plus repoussants aussi la remerciais-je intérieurement d’avoir songé à mon confort, bien que la pauvre femme s’imaginait sans aucun doute qu’un beau gentleman pourrait me faire changer d’avis quant à la question du mariage. Je pensais pourtant m’être montrée assez convaincante sur le sujet : je refusais d’épouser qui que ce soit avant d’être laide et ridée ; puis encore, si tant est que mon futur mari accepte de me laisser libre comme l’air, comme je l’avais toujours été. Je n’étais pas un oiseau exotique à mettre en cage, et les manières du jeune homme qui me faisait face n’avaient rien pour rassurer mes soupçons concernant ses intentions à mon égard.
- Bonjour Monsieur, répondis-je cependant avec toute la formalité qui était attendue de moi. Suivant son exemple, j’allais même jusqu’à m’incliner à la hauteur de son rang – un membre important de la classe moyenne devinais-je par ses vêtements élégants. Il ne pouvait pas néanmoins appartenir à l’aristocratie sans quoi l’aurais-je sûrement rencontré auparavant en salon ou soirées, attractions dont j’avais toujours été très friande.
Je me gardais bien de revenir sur le compliment qui m’avait été fait, me contentant ainsi de le remercier le sourire au lèvres. Dieu seul savait qu’il n’était pas du comme on pourrait aisément l’imaginer à une démonstration de jubilation ou de vanité encouragée par son commentaire, mais à un fou rire déplacé qui menaçait de m’échapper – ce qui aurait été de bien mauvais goût compte tenu de la situation. Ce fut finalement l’origine de mon amusement qui y mit fin en saisissant ma main d’une poigne ferme mais délicate, à laquelle je ne tentais pas de me dérober – Mère jubilait. Mon prétendant y déposa un baiser chaste, sans doute conscient des regards qui s’étaient posés sur nous depuis qu’il s’était avancé à notre approche.
- Ce serait pour moi un honneur.
Si l’exagération n’était qu’artifice, Mère n’en attendait pas moins de moi ; et j’étais certaine qu’elle aurait fait son possible pour rattraper mes paroles au moindre mot déplacé. Sans même le savoir, ce jeune homme m’avait offert l’occasion rêver de m’éloigner assez de ma famille pour pouvoir mettre mon plan à exécution : cette balade promettait d’être des plus divertissantes.
- Je serais pour vous un livre ouvert, me permis-je d’ajouter avec une fausse modestie que Mère n’eut aucun mal à interpréter comme ce qu’elle était : l’annonce d’un combat qu’elle ne pourrait gagner.
Cela ne signifiait pourtant pas qu’elle allait aussi facilement m’abandonner la victoire – de fait, la bienséance m’imposait la présence d’un chaperon, et le choix était des plus variés en cette sortie d’église. Après tout fallait-il maintenir l’illusion : au yeux de l’aristocratie anglaise, j’étais toujours une jeune fille à marier.
- Je ne pense pas que cela soit nécessaire, insistai-je néanmoins en m’appuyant sans honte aucune sur le soutien que m’apporterait je l’espère celui qui s’imaginait sans doute demander ma main. Monsieur me semble être un gentleman tout à fait respectable, n’est-t-il pas ?
Sur ces derniers mots, je me tournais vers le-dit gentleman, dont je ne connaissais même pas le nom. A quoi bon après tout ? Lui non plus ne tiendrait pas la journée.
Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Jeu 22 Mar - 7:41
Silencieux, John observait la guerre qui semblait se livrer sous ses yeux, à travers le ton mesuré de la jeune fille. Si un autre gentleman n'y aurait pas prêté la moindre attention, le Wicker avait trop côtoyé les combats clandestins pour ne pas reconnaître une situation de force lorsqu'il en voyait une. Il n'en connaissait cependant ni les tenants ni les aboutissants : était-il, lui, au milieu de cette joute sous entendue entre mère et fille ? La doyenne Bellamy ne lui avait pas évoqué cette difficulté, et il ne s'y était donc pas préparé... Et il n'était pas sur de vouloir essayer de convaincre une demoiselle que l'idée de devenir une épouse, dans tous ses devoirs, n'intéressait pas, si c'était bien ce qu'il soupçonnait. Encouragé néanmoins par le regard de l'une et l'autre, un d'excuse, l'autre d'une sorte de défi, John garda la main d'Ambrosine dans la sienne, pour la poser sur son bras, afin de l'accompagner.
- Je me plierai à votre décision sur ce point, répondit John à la déclaration de sa prétendante, qui évinçait ainsi la présence d'une tierce personne lors de leur échange. C'était, encore une fois, une chose à laquelle il ne s'était pas attendu, et il accepta cette marque de confiance avec une certaine retenue. Vous semblez prompte à vous faire une opinion, ma dame.
Il ne tenait ni à la contredire, ni à lui mentir. Il se savait bien peu respectable, bien qu'elle n'ait rien à craindre de lui. S'il devait un jour en faire sa femme, il ne tenait nullement à ce que leur couple soit basé sur une méfiance non nécessaire, pas moins que sur un détournement flatteur de la réalité. Meme s'il ne laisserait jamais à personne le choix de ses propres activités, et surtout pas le sexe faible, il tenait à faire de celle qu'il choisirait une partenaire aussi investie que sa sœur dans ses agissements, ce qui impliquait d'en connaître parfaitement la teneur, sans en émettre le moindre jugement, ou le trahir d'une quelconque manière qui puisse le menacer. La jolie rousse avait dit elle-même qu'elle serait un livre ouvert, et même si John avait la désagréable sensation que ces paroles ne lui étaient pas destinées, il les avait pris comme telles, et comptaient bien les porter à profit.
- Gratifiez-vous tous vos prétendants d'une telle faveur ? Demanda John, sans détours, à la jeune femme qui l'accompagnait, en se baissant vers elle comme s'il voulait éviter d'être entendu, alors qu'elle leur avait elle-même évité cette possibilité. De loin, d'un coup d'œil en arrière, le Wicker fit sa mère frémir... Il avait bien compris que son geste de rapprochement servirait sa cause auprès des deux femmes, qui lui offrait une place parfaite pour prendre toute la main. Je dois avouer que je ne trouve guère cela prudent, venant d'une beauté qui doit attirer tant de convoitises.
Il sourit. A ce jeu-là, ils étaient surement égaux, ou le Wicker avait la longueur d'avance de l'expérience que lui valait un âge plus avancé. A leur passage, femmes et hommes se retournaient simultanément. John se savait plaisant à regarder, et d'une fortune désormais qui lui assurait la bénédiction de la plupart des familles... Et Ambrosine n'en était pas moins une célibataire désirable, comme il avait cru le comprendre par le nombre de ses soupirants qui avaient été évincés. Si cette information avait été voulue cachée, John l'avait néanmoins attrapée au détour d'une conversation, et s'en était trouvé intrigué.
- Si je n'ai nulle intention d'attenter à votre vertue ce jour, Ambrosine, je vous préviens néanmoins que mes intérêts ne sont pas d'offenser votre mère pour votre bon plaisir, et je n'insulterai pas votre intelligence plus longtemps en prétendant que ma démarche a été faite en toute innocence, déclara calmement John, tandis qu'il s'avançait. Après tout, il n'avait aucun motif pour être mal à l'aise de la situation, et s'imaginait pouvoir régler un contrat de mariage à la façon brutale d'une affaire financière. Je ne suis probablement pas aussi respectable que vous le déclarez avec tant d'assurance, mais je me ferai un devoir d'être honnête, à condition que m'accordiez sérieusement votre attention.
Puisqu'ils étaient arrivés assez loin dans le parc pour se considérer seuls, John s'arrêta, et fit face à la demoiselle. Il n'avait pas particulièrement d'espoirs, ni même de craintes sur l'issue de cette conversation, mais il tentait sa chance, comme quelqu'un qui avait tout ce qu'il fallait pour gagner, et ne perdrait rien en contrepartie d'un échec.
- Bien sur, je vous rendrais la pareille, en jugeant objectivement de mes capacités à vous rendre heureuse, en l'état d'humeur dont vous me ferez preuve, si vous voulez bien me le partager, poursuivit-il, en la fixant cette fois-ci intensément, comme pour acquérir quelques réponses par le seul discours de son visage... Il était particulièrement sensible au langage du corps, aguerris à percevoir les plus subtiles variations dans le corps de ses ennemis. Je m'excuse si ma franchise vous offense, mais je n'ai pas de temps à perdre avec une femme à qui je ne pourrais offrir aucun confort à l'idée de me donner des enfants.
Si les formes ne manquaient pas à cette déclaration, car le Wicker n'était pas dépourvu d'esprit, le fond était pourtant des plus crus : en une phrase, il avait résumé la vision qu'il avait des devoirs conjugaux d'une manière aussi éloignée du romantisme qu'il pouvait l'être en cette occasion. Et pourtant, contre toutes attentes, il ne percevait pas qu'un rejet définitif dans le léger frisson des cils de la rousse, et décida d'attribuer ce mouvement à une hésitation prometteuse... Dont elle n'avait peut-être pas même conscience. Rendu top audacieux par ce qu'il pensait une première victoire, John laissa son regard vagabonder sur le corsage de la demoiselle, qui répondait tout juste aux exigences de chasteté de l'église. Un sourire charmeur, qu'il réservait généralement aux prostitués dont il honorait ainsi les courbes, en amont d'une autre façon, étira ses lèvres, évoquant un certain danger, car il évoquait sa nature profonde. Un instant, il songea sans doute qu'il pourrait lui inspirer l'envie qu'il suscitait chez ses conquêtes faciles, oubliant qu'une pucelle n'aurait pu comprendre de tels appétits, et serait probablement effrayée plus qu'autre chose s'il les éveillait ainsi. Si John espérait pouvoir profiter de sa femme dans un lit plus chaud que celui des maisons closes, il n'en faisait pas une priorité, et regretta aussitôt d'avoir entrevu cette possibilité, au risque de spoiler d'autres qualités qu'il considéraient prédominantes pour la suite de ses projets de mariage.
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Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Lun 26 Mar - 13:47
"Négociations maritales"
Ambrosine & John
Le gentleman remporta son premier point quand il eut le bon sens de ne pas se mettre en travers de mon chemin, lorsque j’avais évincé le conventionnel chaperon. Si j’appréciais son soutien sur la question, je n’en restais pas moins consciente que cela était tout autant à mon avantage qu'au sien, et que la démarche avait sûrement été entreprise de manière intéressée. Évidemment je n’aurais eut le cœur de le lui reprocher – n’avais-je pas moi aussi été bien prompte à utiliser son influence auprès de Mère ? S’il avait pu sans aucun mal deviner mes intentions, il n’en avait pourtant rien dit, et s’était contenté d’appuyer mes paroles. De ce fait, je le laissais saisir mon bras afin de me guider à l’écart de la foule.
- Devrais-je remettre en question l’impression que j’ai de vous monsieur ? Détournais-je son commentaire par une interrogation sincère que je m’appliquais à masquer habilement sous un ton joueur. Évidemment que j’ignorais tout de sa vie, cependant, je n’étais pas dupe quant à ses intentions, et porter atteinte à une jeune femme dans un lieu public tel que celui-ci -face à une église qui plus est- n’était pas la meilleure demande en mariage qui soit. Je n’avais aucune inquiétude à me faire quant à ses manières – tout me portait à penser qu’il garderait les mains dans ses poches ce jour-là. Néanmoins, la réponse qu’il pourrait me donner m’intriguait profondément : que pouvait bien se trouver derrière le masque de respectabilité qu’il s’efforçait de maintenir ?
Un souffle léger vint me chatouiller la joue alors que mon interlocuteur se penchait vers moi afin de m’adresser ses craintes qui, contrairement à ce que j’avais pu m’imaginer, étaient loin de rejoindre celles de mes parents que je savais nous observer de loin, et trembler d’effroi en constatant la proximité qui s’était installée à son initiative. La décence aurait voulu que j’éloigne mon visage du sien, c’est pourtant avec un sourire complice que je partageais avec lui mon point de vue sur la question.
- C’est un privilège que je vous réserve avec Dieu pour témoin. Quel être abject oserait faire du mal à une jeune femme face à la maison du Seigneur ?
Mon compagnon ne partageait pas mes croyances, cela était chose sûre. J’avais donc opté pour une tournure plus taquine mais non moins respectueuse.
- A moins que je ne doive interpréter cela comme une question détournée sur les affections dont on me témoigne. Si tel est le cas rassurez vous cher ami, vous devez être le candidat le plus recevable.
Cela avait le mérite de clarifier les choses -et tant mieux si cela flattait son égo, je n’avais jamais été avare en compliments. De fait, l’idée même que sa présence et sa conversation me soit encore supportable signifiait qu’il avait assez d’esprit pour me divertir. Je n’allais certainement pas m’en plaindre. Bien évidemment, il fallut néanmoins qu’il gâche le bon moment que nous passions par une déclaration des plus attendues. Il souhaitait demander ma main, quelle surprise ! Si cela n’avait pas été le cas, Mère ne nous aurait pas épié de loin, dans l’espoir d’attraper quelques mots envolés. Si cela n’avait pas été le cas, jamais il n’aurait été me chercher devant la porte de l’Église à la fin du sermon. Ses efforts étaient louables, mais n’en restaient pas moins décevants – j’étais certaine qu’il aurait fait un excellent amant, vif d’esprit qu’il s’était montré à travers nos quelques phrases échangées.
Quel gâchis, songeais-je avec un soupir, avant de me raviser à l’écoute de son discours. Dire que sa franchise m’avait fait tomber des nues aurait été un euphémisme. Ce serait mentir que d’assurer que sa démarche était semblable à celles que j’avais pu entendre ces deux dernières années, aussi concédais-je à l’écouter jusqu’à la fin avant de lui adresser une phrase en apparence simple mais qui à mes yeux revêtait un sens abyssal.
- Soit, je vous autorise à me courtiser, si tel est votre désir, laissais-je échapper sous son regard scrutateur, à la mesure du mien. Nous nous dévisagions tels deux maîtres de poker à la recherche d’un quelconque indice pouvant nous guider à travers les mystères que nous dissimulions derrière nos sourires guillerets et nos yeux doux.
- Je vous ai promis la vérité alors la voici monsieur : en toute honnêteté, je me préoccupe bien peu de votre respectabilité ou de votre rang. Votre franchise en revanche me plaît tout à fait et j’espère qu’il en sera ainsi entre nous. Si tel est le cas, peut-être seriez vous à même de me convaincre ?
Je laissais volontairement ma question en suspens, à la fois dans le but de lui faire comprendre qu’il valait mieux pour lui ne pas se faire de faux espoirs concernant mes intentions, et de laisser le temps à ses yeux de vagabonder aux limites de ce que la pudeur autorisait.
- Mais avant cela, peut-être pourriez vous commencer par m’indiquer votre nom ? Ou peut-être attendiez vous de me le communiquer une fois arrivés devant l’autel ? Me moquais-je en veillant à ne pas m’attirer son courroux. Il aurait été bien dommage d’en finir ainsi, sur une note si négative. Cet homme avait de quoi plaire, c’était une évidence ! Et j’avais beau tenir le mariage en horreur, je me devais d’admettre que je n’étais pas contre l’idée de me laisser séduire par un gentleman au physique si agréable – cela me changerait des vieux gentilshommes auxquels Mère avait tenté de me reléguer et des jeunes aristocrates inexpérimentés qui tentaient leur chance entre deux soirées mondaines. L’idée à elle seule me faisait saliver.
Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Mar 27 Mar - 5:41
John avait eu tôt fait d'oublier les regards qui les avaient suivis, et se tenaient désormais à une distance confortable. Après tout, s'il savait l'enjeu que représentaient les grâces d'une belle-famille, il entendait faire de sa femme uniquement sa plus précieuse complice, même s'il n'y associait pas nécessairement de notion d'affection. Il devinait également que si Ambrosine n'était pas encore promise, c'était par la seule force de son caractère, et qu'elle était donc la seule encore à décider de son avenir, contre l'avis surement de ceux qui la pressaient à prendre époux.
- Gardez cette impression madame, et si vous m'accordez d'être celui qui vous protège toujours, je vous promets de ne jamais faillir à vos espérances, déclara le Wicker avec aplomb, en gardant une distance trop étroite avec la jeune femme pour soutenir les convenances qu'il prônait... Il n'en jouait néanmoins pas pour l'effrayer, et ses propos n'avaient guère le ton d'une menace, si ce n'était une moquerie confondue. Si elle le rejetait, il n'irait pas attenter à sa pureté pour autant... Il ne lui offrirait juste jamais l'opportunité d'éclairer son opinion de lui sous d'autres lumières. J'espère en effet, quoi qu'il en soit, que votre chemin ne croisera jamais celui d'un homme mal intentionné à votre égard, car je n'ai guère assez de foi pour croire que Dieu puisse intervenir pour prendre votre défense, tant bien cet outrage se passerait sur le seuil de sa maison.
La flatterie arracha un discret sourire de triomphe au jeune homme, qui n'hésita pas à lui retourner franchement son compliment par un regard satisfait. Elle l'amusait, en quelques sortes, avec ses manières qui témoignaient, comme il l'avait craint, d'une longue file de prétendants. Et ils l'avaient tous ennuyés visiblement, ou elle mimait parfaitement le déni, car John s'était senti à ses mots mis sur le devant de la liste... Il se méfiait néanmoins des tours de ces demoiselles dont sa cadette l'avait mis en garde. Il avait demandé l'honnêtement, et espérait bien l'obtenir.
- J'accepte donc le titre de "recevable", avant de vous convaincre d'employer envers moi d'autres adjectifs... Et si je puis vous rassurer également, je pense que peu d'hommes qui soupirent devant vos charmes vous veuillent autre chose que du bien, bien qu'ils soient trop éblouis pour constater l'absence de réciprocité, sans doute, se permit-il d'ajouter, en ne la quittant pas des yeux, réalisant que ce sous-entendu tomberait incompris dans les oreilles d'une pucelle, et ferait probablement rougir légèrement une femme qui avait conscience des attraits de la chaire. Vous me donnez l'espoir que nos désirs puissent en effet s'accorder.
En toute sincérité, il ne souhaitait pas moins que d'établir un contrat juste et plaisant pour chaque partie : il ne tenait pas à supporter pour le reste de sa vie une épouse qu'il n'aurait pu rendre heureuse. C'était un point pour lequel, en dehors du rang et de toutes apparences, il jugeait essentiel. S'il aimait obtenir ce qu'il convoitait, il n'entendait pas, pour une fois, l'arracher de force au destin... Il savait qu'il ne pourrait régler ce genre d'affaire comme il le faisait pour toutes les autres, au risque de s'attacher à un quotidien de misère spirituelle. S'il n'avait aucune ambition amoureuse, il voulait plaire assez pour que celle qui partagerait son lit le fasse en plein consentement, et conçoive des enfants qu'elle élèverait avec un soin naturel.
- Je vous remercies de l'intérêt que vous me portez, au point de corriger mon manquement à la plus basique politesse... John Wicker, se présenta-t-il, en étirant plus encore son sourire charmeur. En vérité, il se savait non coupable dans cet oubli, puisqu'il aurait été à la mère de faire cette introduction, mais il n'était pas le genre d'homme à blâmer quiconque pour une maladresse qu'il pouvait aisément rattraper. Je vous réserve d'autres mystères plus intéressants pour l'autel, si vous me laissez vous y conduire, et partagiez ce patronyme que vous me réclamez pour l'instant par simple curiosité.
Le sujet du mariage ayant été perçu comme sensible, John s'exerçait à la taquiner sur ses faiblesses également, en insistant sur la demande bien spécifique qu'il lui avait formulée. Il avait pris sa main pour lui donner son nom, ainsi que le tolérait le protocole dans ce genre de circonstances, mais la garda dans la sienne plus longtemps que ne l'autorisait les traditions, laissant légèrement glisser ses doigts sur le gant doux pour atteindre la peau de son poignet, plus douce encore. A ce contact, il releva son visage pour accrocher de nouveau son regard, et y lire son approbation ou sa crainte. Il eut un instant peur d'être allé trop loin, et son objectif n'était en rien d'effrayer la demoiselle, ou de la déshonorer d'une quelconque manière... Il avait juste surement côtoyer trop les milieux modestes pour ne plus connaître les limites que lui imposaient une classe supérieure... Ses façons d'aristocrate étaient parfois étouffées par les preuves d'une éducation plus brutale, qui se traduisait parfois dans son comportement.
- Que devrais-je savoir de vous qui m'aiderait à comprendre ce que vous pourriez attendre d'un mari ? Demanda-t-il, toujours soucieux que son offre soit équitable à son égard. Malheureusement, l'époque ne permettait pas d'apprendre à se connaître pendant des mois, puisqu'un nombre démesuré de rendez-vous aurait attiré l'opprobre sur un couple non uni par des liens sacrés. Si la société se voulait d'être hypocrite sur le sujet, elle n'ignorait donc pas que deux personnes qui se courtisaient trop longtemps avaient plus de chances de succomber au péché, et qu'il rassurait donc chaque famille de mettre au plus vite un accord officiel sur une consommation potentiel de ce rapprochement. Je devine déjà que vous n'êtes pas de celles qui laissent les autres décider pour elle... Je me féliciterai d'autant plus de vous prouver que je suis le bon choix, s'il s'avérait que nous soyons compatibles.
Bien entendu, malgré ses insinuations presque pressantes, John se contentait pour l'instant d'évaluer la dame dont on lui avait dressé un portrait flatteur... Il savait d'expérience que la réalité pouvait conduire à d'autres conclusions, et il avait été clair sur sa démarche : lui aussi ne s'engagerait que s'il était convaincu que leurs discussions étaient suffisamment fructueuses pour les rendre dépendants sur une vie entière.
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Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Mer 4 Avr - 15:29
"Négociations maritales"
Ambrosine & John
Au fur et à mesure de notre discussion, je remarquais que le jeune homme n’avait pas reprit ses distances comme il était supposé le faire, si tant est que son rapprochement ait été lié à une volonté de se jouer de mes parents comme je l’avais tout d’abord présumé. Pourtant au contraire, alors que celle-ci progressait, il semblait s’en satisfaire – et je ne le repoussais pas. Moi-même, j’appréciais cette proximité qu’il avait initiée : elle me permettait de l’observer plus attentivement. Je n’avais pas dans l’intention de dissimuler ma curiosité à son égard, de la même manière dont il ne masquait pas son intérêt pour ma personne.
- M’aurait-on trompée ? Le temps des chevaliers n’est-il pas révolu ? Votre proposition me flatte Monsieur, mais je doute d’être la princesse que vous recherchez, lui annonçais-je sans ambages. Je lui avais promis sincérité, façon dont ma mère n’avait pas l’habitude de procéder auprès de mes prétendants – je doutais que les quelques paroles qu’ils aient pu échanger à mon sujet eussent été le reflet de ma véritable personnalité. Nous verrons bien si son offre tiendrait toujours lorsqu’il viendrait à connaître la femme dont il avait demandé la main. Bien plus d’un s’en était mordu les doigts.
- Profane ou croyant Monsieur, regardez donc autour de vous, l’intimai-je tout en tournant la tête en direction de l’église que je venais de quitter. Les rues sont bondées à la sortie du sermon. Il est tout aussi facile de menacer une jeune femme que de se faire prendre en plein délit. Je doute qu’un homme attaché à sa réputation s’y risque. Il me suffirait de crier pour que l’on vienne à mon secours.
Je devais avouer m’être sentie forcée de défendre ma cause auprès de cet homme qui ignorait encore tout de moi. La première impression était primordiale, et j’aurais regretté de me présenter comme une sotte auprès de lui lors de cette rencontre. Lui n’en était certainement pas un.
- Une femme a bien des tours dans son sac. Sa faiblesse face à l’homme lui impose de mettre en place des stratagèmes. Vous réaliserez bien vite, si votre intérêt ne se flétrit pas, que ces méthodes ne me sont pas étrangères lorsque la situation le requiert.
Mon aveu avait le mérite d’être explicite – j’estimais qu’il était capable de l’entendre sans que cela influe de beaucoup l’image qu’il entretenait de moi. Cela étant dit, j’espérais que cela apaiserait l’appréhension que mon comportement lui avait inspiré : à ma manière, je savais parfaitement défendre mon honneur et intégrité. Que cela constitue l’une des raisons pour lesquelles je considérais qu’un homme ne me serait qu’accessoire, je me retins de le mentionner. Au contraire, je fis en sorte de ne pas effacer son sourire satisfait et le laissais profiter de sa semi-victoire à l’idée d’être en haut de ma liste de prétendants. Pour moi, cela ne signifiait rien qui ressemblait de près ou de loin à une promesse de mariage ; mais je n’ignorais pas que cela constituait pour lui un espoir d’ atteindre cet objectif que je m’efforçais chaque jour de repousser un peu plus.
L’adjectif que je lui avait attribué semblait néanmoins lui convenir assez pour que l’on en arrive à une sorte de terrain d’entente. Je restais ouverte à toutes les possibilités, libre à lui de gagner ma confiance et mon respect afin d’espérer un jour prochain obtenir de moi des mots plus doux. De fait, les siens étaient agréables à mon oreille, bien que plus osés que ceux que les gentlemen utilisaient habituellement. Et sans doute fut-ce la raison pour laquelle l’attraction que j’exerçais sur lui se révélait graduellement réciproque à mesure que son charme franc venait faire rosir mes joues poudrées et dessiner un sourire sur mes lèvres gourmandes.
- Vous me semblez bien prompt à proposer ce genre d’hypothèses Monsieur, ne seriez pas vous même aveuglé ? Me moquais-je en acceptant avec un plaisir coupable le compliment qui m’était fait.
Je ne doutais pas un instant qu’il me considère comme une épouse décente, il me l’avait assez manifestement fait comprendre - mais qu’il m’envisage comme une amante désirable sans pour autant m’en tenir rigueur m’étonnait autant que me captivait. A quel curieux personnage j’avais affaire ? Je réalisais avec ravissement que je l’ignorais encore pleinement.
- Ne vous en excusez surtout pas Monsieur Wicker, sans doute en aurais-je eu connaissance bien plus tôt si Mère n’avait pas jugé inutile de m’informer de ces intrigues. Elle a dans l’idée qu’il est bien plus aisé de trouver un époux à sa fille lorsque celle-ci n’est point présente ; mais je ne peux le lui reprocher. Moi-même suis-je une femme pleine de surprises, lui confiais-je avec un sourire, en faisant subtilement écho à ses déclarations. Le fait que je le tentais pas de dégager la main qu’il avait saisie pour se présenter en était à mes yeux une preuve suffisante. La plus naïve des jeunes filles aurait remarqué qu’il l’avait une fois de plus gardée dans la sienne bien plus longtemps que ce que la politesse exigeait.
Comme pour confirmer mes hypothèses, je le sentis aller au contact de la parcelle de peau que mon gant laissait dénudée en cherchant dans mon regard une approbation que je n’avais pas l’intention de lui refuser.
- J’espère néanmoins en avoir un avant-goût avant d’accepter de devenir vôtre devant le Seigneur. La vie de prisonnière ne me conviendrait pas, lui lançais-je en riant à sa taquinerie. Malgré le sérieux de la situation, j’avais remarqué que le jeune homme était sensible à l’humour – et pour cela, je ne l’en appréciais que plus. Certes, le sujet était des plus importants à mes yeux : rester éternellement victime d’un mariage qui ne convenait ni à mon mari ni à moi-même me paraissait le pire cauchemar d’une femme libre, cependant, rien ne m’empêchait d’amener le sujet avec une note légère. De telle façon, sa réaction ne me serait que plus révélatrice, présumais-je en maintenant mon regard dans celui de mon prétendant, comme il l’avait fait lui-même depuis que nous avions commencé à échanger. Néanmoins, le cours de la discussion s’annonçait en ma défaveur. Bien que je sentais mon interlocuteur prêt à se plier à mes exigences pour peu que je réponde à ses critères primordiaux, je m’en trouvais forcée à lui confier une part de moi-même que j’aurais préférée maintenir sous couvert, si tant est que je lui exprime mes véritables craintes, avec l’honnêteté que je lui avais promise. Un instant, je m’interrogeais sur ce qu’il était nécessaire d’avouer à cet homme que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam. Mes efforts de galanterie valaient-ils que je révèle au premier venu ce qui pourrait réduire à néant ma carrière naissante ? Non, je ne pouvais lui parler de mes livres sans risquer de ne point pouvoir prendre de nouveau la plume.
- Vous êtes perspicace monsieur, je suis assurément une femme qui aime maintenir un semblant de contrôle sur sa propre existence. Mais vous devriez également savoir que c’est précisément ce qu’un mari ne saurait me laisser, répliquai-je plutôt dans l’espoir de reporter la conversation sur un sujet qu’il m’était moins risqué de mentionner.
J’en étais certaine pour y avoir songé maintes et maintes fois : il était tout bonnement impossible qu’un époux me laisse délibérément écrire à ma guise sans tenter de mettre fin à cette combine que j’avais mise en place. Pire encore, peut-être même me forcerait-il à publier sous mon propre nom de façon à s’en attribuer le mérite et les bénéfices, me reléguant à un lectorat de vieilles femmes à l’esprit critique aussi archaïque que leurs parures dépassées. Je n’étais pas née d’un sang noble pour ne devenir rien de moins qu’une ouvrière à la charge de mon propre compagnon.
Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Ven 6 Avr - 5:13
Aucun des deux jeunes gens ne semblait plus se préoccuper de l'extérieur, tant préoccupés qu'ils étaient par leur conversation. A vrai dire, John n'agissait plus pour plaire ou non aux parents, mais par un instinct naturel : cet entretien était devenu intéressant. Ce n'était pas la première fois qu'une jeune femme éveillait sa curiosité, et finissait par le décevoir, d'une quelconque manière, mais son exigence pressentait qu'Ambrosine pourrait peut-être se présenter comme la partenaire qu'il avait espéré. Même s'il ne s'emballait plus comme un adolescent, le Wicker savait également le besoin de prendre quelques risques pour obtenir les réponses qu'il recherchait, et jouer avec le feu. C'était un jeu qu'il tenait à garder honnête, mais qui était pourtant très hasardeux.
- Pourquoi condamner toute une époque ? Les chevaliers avaient certaines valeurs qu'il serait peut-être bon de remettre au gout du jour... Je crois qu'à vouloir trop défendre la cause de l'égalité et des femmes, mademoiselle, on pourrait les desservir, déclara John, prêt à argumenter dans ce sens. Il avait rencontré plusieurs femmes déjà qui se réclamaient des droits irrespectueux de leurs propres natures. Peut-être avez-vous une vision des princesses plus dépréciatrice que la mienne, et une opinion de vous qui s'y accorde.
Il ne s'attardait plus désormais sur son corsage, puisqu'elle évoquait des sujets qu'il lui tenait aussi à cœur de défendre, et qui faisaient appel à tout l'intellectuel qui se cachait derrière ses prunelles vives : c'est donc elles qu'il fixait. Pour avoir quasiment élevé sa jeune sœur, avec tout l'amour et l'attention dont il était capable, il avait appris qu'aimer les femmes, c'était avant tout accepter qu'elles étaient femmes, et les aider à s'épanouir en tant que telles, dans tous les domaines auxquels puissent prétendre. Les protéger, c'était leur faire comprendre qu'elles n'avaient rien à prouver aux autres, mais tout à créer pour elles. Une femme confiance craignait-elle de voir un homme la défendre, lorsqu'elle se retrouvait physiquement en danger ? Etait-ce la diminuer que de subvenir aux différences qui partageaient les deux sexes, en les rejoignant, en les faisant coopérer ? Non, John ne considérait pas les hommes et les femmes égaux, mais plutôt comme les deux moitiés d'une seule pièce, qui devait donc se compléter et se mélanger juste assez pour trouver le parfait équilibre.
- Certains hommes n’ont pas de réputation à conserver… Vous devriez craindre ceux qui n’ont rien à perdre plus que les autres, évidemment, lui assura-t-il d’un air plus sombre, alors qu’elle affirmait se sentir en sécurité dans la foule. Pour avoir côtoyé le désespoir de près, John ne connaissait que trop bien ses conséquences. Crieriez-vous, Ambrosine ?
Il avait demanda tout en soutenant son regard intensément, comme si cette question avait pu avoir bien plus de sens qu’elle n’y paraissait. Et elle en avait en vérité, des sous-entendus, car une réponse aurait pu révéler bien plus sur la nature de la demoiselle qu’elle ne l’aurait voulu : selon comment elle l’interprèterait, bien sur, mais aussi sur l’honnêteté aussi de ses hypothèses. Etait-elle du genre à appeler à l’aide ? Et si lui la poussait dans ses derniers retranchements, tenterait-elle de lui échapper ? John n’attendait pas seulement une réponse de ses lèvres, mais de tout son visage, qu’il observait avec attention. Le langage du corps, en général, lui était bien connu, et il se servait de ce talent dans toutes les occasions.
- Me prenez-vous pour un homme qui chercherait à vous exploiter par la force ? Demanda-t-il, réellement déçu par ces paroles, qu’il estimait déplacées, après lui avait fait si clairement preuve de sa sincérité. J’osais croire que vous aviez compris, mademoiselle Bellamy, que mon intérêt s’accompagne de la plus entière confiance… Je déplore que vous pensiez avoir besoin de stratagèmes avec moi… Ils ne me plaisent pas plus que d’autres artifices dont pensent devoir se revêtir les femmes pour révéler leur beauté.
Bien sûr, il n’était pas de mauvaise foi au point de prétendre fuir les femmes qui se fardaient légèrement, ou choisissait des toilettes propres et bien ajustées… Sa préférence allait néanmoins aux plaisirs crus de la chaire, à l’absence d’obstacles quant à la découverte d’un autre corps ou d’une autre âme. Il n’imaginait pas sa femme lui cacher quoi que ce soit, ou le manipuler d’une façon dont il ne soit pas conscient et complice.
- D’après ce qu’on m’a dit, l’amour seulement rend aveugle, et j’ai toujours préféré la raison aux sentiments, se défendit John, non sans la gratifier d’un sourire amusé. Il ne mentait pas néanmoins, et s’il souhaitait partager avec son épouse une certaine complicité ou attirance, il ne visait point le coup de foudre. Selon lui, rien n’était moins stable et dangereux, et il ne tenait pas à tomber dans ce piège. Je suis justement à vos cotés en ce jour pour soulever le voile dont vous couvre votre mère, et vous laisser me montrer votre vraie visage, tel que vous souhaitez le porter à ma connaissance.
John fronça légèrement les sourcils, commençant à réaliser à quel point la jeune fille semblait traumatisée par la simple idée de s’unir devant Dieu. Il avait pensé au début qu’elle jouait de ses charmes et des désirs qu’elle suscitait, et comprenait à présent qu’elle était rendue méfiante par une idée qui était aussi éloignée de la chose que possible, une fausse impression surement causée par l’insistance de ses parents, peut-être plus qu’une simple rébellion d’adolescente.
- Votre vision du mariage me semble pour le moins erronée, déclara-t-il, en lachant sa main, pour lui montrer qu’il ne tenterait pas de la convaincre en l’influençant par une autre manière que la voie de son intellect et de ses arguments. Il me semble qu’au contraire, pour une femme, il est une délivrance, et plus particulièrement dans votre cas. Vous deviendriez la maitresse de votre maison, la mienne s’il vous en convient ainsi, et il est peu de maris qui ne laissent leur femme commander leur monde, dans leur intimité, à ce qu’il est rapporté à mon attention. Bien sur, il est des exceptions, et vous avez la chance d’avoir le choix, pour ne pas vous engager avec quelqu’un qui ne vous conviendrait pas, ce qui est plus de contrôle qu’un homme ne peut en attendre dans beaucoup de cas. Il ne siérait qu’à vous ensuite de ne pas devenir votre mère, et d’élever vos enfants en leur enseignant que l’union fait la force, par l’exemple de votre propre bonheur.
Il manquait sans doute au Wicker une information capitale sur ses mœurs et ambitions, qui l’empêchait de comprendre ses craintes sur la question… Et il l’interrogeait du regard, dans l’espoir qu’elle lui donnerait l’opportunité de palier à ses incertitudes plus précisément.
- Je pourrais comprendre que je ne vous plaise pas, Ambrosine, mais je ne peux accepter votre refus s'il se base sur l'idée insultante que je puisse mal vous traiter, et ne pas vous autoriser à être vous-même sous le toit que je vous propose, conclut John, sans une pointe d'énervement, mais avoir le plus grand sérieux, afin qu'aucune de ses paroles ne soient remises en doute. Bien sur, j'estime qu'une épouse a des devoirs, tout comme je m'en imposerais à moi-même... Mais je ne pense pas que ceux-ci puissent se comparer à une quelconque torture, et j'ai plutôt l'impression optimiste que la plupart soient naturels toute personne qui possède une âme bien formée.
John ne cherchait pas absolument à la faire sienne, et il ne la forcerait pas si elle se butait sur ses opinions... Il n'avait pas de temps à perdre si la rousse se braquait contre l'autorité de ses parents, et ne lui confiait pas clairement ses craintes, afin qu'il puisse évaluer leurs conséquences. Il les sous estimait peut-être, devinant qu'il aurait pu s'agir d'une simple appréhension des relations conjugales, chose qui n'était pas insurmontable, et pourrait meme jouer en sa faveur, avec le temps et l'expérience.
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Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Mer 11 Avr - 17:45
"Négociations maritales"
Ambrosine & John
A mesure que la conversation progressait nous continuions à marcher dans les rues tel un jeune couple. Mère de cette distance ne pouvait sans doute rien percevoir de plus que nos formes indistinctes – et je n’en étais pas peu satisfaite. Qui donc aurait pu présager que la discussion serait si agréable ? Je n’aurais certainement pas parié la dessus lorsque mon prétendant m’avait approchée aux portes de l’église. A présent, je me délectais de la situation, à tel point que je me félicitais d’avoir – bien que par volonté de me rebiffer contre ma génitrice plus que par désir d’intimité – évincé le chaperon : je doutais que de telles paroles eussent été autorisées dans un contexte plus formel. Notre société était bien loin d’être fondée sur la sincérité. Et peut-être avais-je tort d’y accorder une telle importance, me questionnai-je, jusqu’à ce que Monsieur Wicker rebondisse sur un sujet qui me tenait particulièrement à coeur.
- Ne vous méprenez pas Monsieur, j’apprécie le respect dont vous me témoignez. Votre dévouement est tout à fait honorable, et j’admets sans honte que l’idée d’être protégée par un homme ne me répugne pas- après tout les policiers n’en sont-ils pas ? Ce que j’entendais, c’est que les hommes droits se font bien rares de nos jours. Mais si vous vous présentez comme tel, soit : soyez donc mon chevalier blanc. Je serais bien sotte de m’y opposer, terminai-je en riant.
De nouveaux mouvements suffragistes apparaissant chaque jour à n’en plus pouvoir les compter, je ne lui tenais pas rigueur de cette incompréhension : le malentendu était plus que permis. Moi même m’étais-je déjà interrogée sur la question : Avais-je besoin d’un homme ? Très certainement. En toute franchise, je ne me voyais pas évoluer dans la société sans un partenaire à mes côtés. Cela devait-il forcément me contraindre à un mariage ? J’étais persuadée que non, rien ne m’y obligeait.
- Mais sachez que je n’ai des princesses que les atours, continuai-je après une brève réflexion. Je ne les condamne pas, je le constate. Et peut-être aurez vous l’occasion d’en faire de même si vous vous plaisez en ma compagnie.
De fait, cela aurait été mentir que d’assurer que sa présence m’était désagréable, et je m’enchantais à l’idée que les sujets que nous évoquions le passionnent lui aussi. Ses yeux étaient à présent fixés aux miens, ses oreilles attentives – il n’était pas courant de trouver aussi bon public en dehors des salons que j’organisais. Il y a bien une chose que je concédais aux suffragettes : une femme n’avait pas sa place en politique. Si je laissais bien volontiers le vote aux hommes, il était ridicule qu’une femme ne puisse être écoutée comme n’importe quel autre individu. Preuve en était que c’est ce que Monsieur Wicker était en train de faire – et je ne l’en respectais que plus encore. C’était un geste appréciable que je lui rendais volontiers sous la forme d’un sourire reconnaissant. J’avais beau porter sur moi une réputation de lunatique, j’étais loin d’être l’une de ses sorcières qui protestaient dans les rues. J’étais ouverte aux débats, quels qu’ils soient.
- Je les crains, comme toute femme respectable le ferait, confirmai-je tandis que ma bonne humeur disparaissait pour laisser place à un calme sévère que l’on ne me connaissait que guère. Cela ne m’empêchera pas de vivre néanmoins. Je peux prévoir autant que mes moyens me le permettent, mais l’on ne peut pas toujours tout empêcher, n’est-ce pas ?
J’ignorais si la question lui était adressée directement, ou si elle n’était que le reflet de mon propre questionnement. Quoi qu’il puisse en penser, j’étais formelle sur le sujet, et cette discussion même suffisait à me prouver que je n’étais pas loin du vrai.
- Dites vous bien que nous n’aurions jamais pu tenir ces propos en ce moment même si j’avais crains que vous ne tentiez de me faire du mal. La prudence aurait voulu que je reste au sein d’un cercle d’amis, je vous ai pourtant volontiers suivi, et ce, sans chaperon. Je vous ai accordé ma confiance, et vous vous en êtes montré plus que digne, le rassurais-je en me demandant si mes paroles avaient été mal comprises par mon interlocuteur. En aucun cas je n’aurais envisagé de lui jouer un tour – je n’étais pas si cruelle ! Avoir les moyens de se défendre ne signifiait certainement pas les utiliser à des fins malveillantes. Quant bien même, encore aurait-il fallu que j’en ai, mais je ne croyais pas détester qui que ce soit à un point tel qu’il me pousserait à envisager de telles perfidies.
- Je crois bien que nous nous sommes mal compris Monsieur, je n’ai aucune intention de vous causer du tort. Diantre, je suis de celles qui aimeraient rendre le monde un peu plus doux pour tous ! Malheureusement, vous semblez savoir tout comme moi que certains ne partagent pas cet avis. Vous sembliez vous inquiéter de ma crédulité, ainsi je vous informais simplement que je ne suis pas une victime passive. Quant bien même un être malhonnête tenterait de me porter atteinte, je ne le laisserais pas s’échapper sans rien faire. Si cela n’est pas dans votre intention – et je ne crois pas un seul instant que ce soit là votre ambition, vous me paraissez bien plus intelligent et honnête que cela- vous n’avez aucun soucis à vous faire.
Si j’avais la réputation d’être une excellente oratrice, j’espérais de tout mon coeur avoir réussi à le convaincre. La situation était limpide dans mon esprit : si je n’attendais rien de cette premier rencontre, je ne désirais aucunement laisser aux yeux de mon nouvel ami une impression médiocre.
- Sachez que je ne reviendrais pas sur mes paroles. Je ne vous ai point trompé : j’ai dans l’intention de me montrer franche avec vous et de vous dire la vérité sans faire de façons, lui assurai-je une fois de plus en maintenant délibérément mon regard dans le sien. Je tiens simplement à souligner que ce même voile dont vous me parlez a été placé là pour une bonne raison.
De fait, je n’ignorais pas moi même pourquoi ma mère avait préféré s’occuper d’organiser cette rencontre sans même m’en informer. Prévenue, j’aurais sans doute refusé cette promenade en prétextant quelque mal de tête foudroyant ; si tant est que je n’eus pas eu dans l’idée de le faire fuir comme les précédents. En toute objectivité, cela avait été une très bonne stratégie de sa part. En me mettant ainsi face aux faits, il m’aurait été bien difficile de m’échapper de cette situation sans paraître impolie ou froisser son égo.
- Si les sentiments ne sont pas de mise, parlons donc de jugement : je ne vous ai pas caché avoir rencontré un nombre certain de prétendants. A votre avis, pour quelle raison ne suis-je donc pas encore mariée ? Lui demandai-je en jouant nerveusement avec mes gants.
C’était risqué, sans aucun doute. J’ignorai d’où cette audace m’était soudainement venue, mais je savais qu’elle m’aurait valu des remontrances si qui que ce soit avait pu assister à notre échange. Pourtant derrière ces mots ne se cachait aucune sorte de malice, mais une véritable curiosité à laquelle se mêlait la candeur de la jeunesse. Le mariage de mes parents était à mes yeux un échec à la mesure des couples qui s’étaient formés autour de moi : des femmes contraintes de se plier aux exigences de leurs hommes qui n’avaient à l’esprit que leurs rêves et leurs ambitions. Bien évidemment, j’aimais les passionnés, ceux qui avaient des aspirations à la hauteur des miennes ; mais comment être certaine que mon futur époux ne tenterait pas de les étouffer pour la simple raison qu’elles ne correspondaient pas à son idéal ?
- Vous me parlez de bonheur, mais pouvez vous me le promettre ? Vous n’êtes pas capable de deviner ce qu’il adviendrait de notre mariage si je venais à accepter votre proposition, pas plus que je le pourrais moi-même.
Cette prétendue certitude, on me la rabâchait chaque fois que j’avais le malheur d’en discuter avec de jeunes mariés. Quel mensonge que c’était ! Des sornettes racontées aux demoiselles romantiques qui cherchent encore leurs princes charmants. La vérité était bien plus froide : le mariage était un pari. Ce n’était rien de moins que laisser dans les mains d’un autre son entière existence. Et je n’étais pas prête à la lui sacrifier.
- Vous vous méprenez, je ne demande pas à contrôler mon époux. Tout ce que je désire, c’est que l’on me laisse le contrôle sur ma propre vie. Est-ce trop demander Monsieur Wicker ? Sans doute qu’un homme droit tel que vous considère la chose comme acquise, mais je peux vous assurer avoir été témoin de revers bien trop néfastes pour que je m’y risque.
Et en cela, Mère n’y était pour rien. Dans le fond, je ne lui reprochais ni mon éducation, ni l’exemple qu’elle avait pu m’offrir – après tout nous entendions nous bien avant qu’elle ne se décide à me marier. De la même façon, je n’en voulais pas à John Wicker de tenter de me convaincre du bien-fondé de sa démarche. Dieu sait que je ne doutais pas de ses intentions ! Cela suffisait-il à me convaincre ? J’avais bien peur que cela soit trop peu pour détruire les barrières qui séparaient mon esprit de mon cœur. Résignée, je m’arrêtais face aux jardins, le regard perdu au loin ; mais surtout, loin du sien, que je ne me sentais pas la force de soutenir tandis que le rouge me montait aux joues.
- Je ne vous mentirai pas Monsieur, je ne reste pas insensible à vos charmes et votre personnalité ; cependant j’ignore sincèrement si je serais capable de vous épouser, conclus-je dans un soupir.
Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Jeu 12 Avr - 21:37
Sans le savoir sans doute, Ambrosine n’aurait pas pu choisir meilleur garde du corps que l’homme qui se cachait à ses côtés derrière ses allures de bourgeois. Ses manières soignées et gracieuses devaient finalement moins à sa primaire éducation parmi la noblesse qu’à son apprentissage de la maitrise de son corps à des fins beaucoup moins louables. Et il en avait un contrôle naturel à présent, instinctif, presque sauvage, qui se fondait totalement dans son comportement, lui donnait un air particulièrement dangereux de félin toujours prêt à bondir. Un œil non expert aurait pu confondre son calme à de la nonchalance, caractère que possédaient souvent ceux qui profitaient d’une fortune confortable… Mais John était à l’opposé du spectrum, ou presque. Il portait une attention redoutable à toutes les choses, et ne se détendait que rarement, comme si son apparence impassibilité ne venait que de l’immense pouvoir qu’il ressentait se tendre à chacun de ses mouvements, dans ses muscles entrainés.
- Je ne sais si je puis être qualifié de droit ou de blanc, mademoiselle, mais je peux sans contester me porter votre champion sans frémir d’aucune menaces, déclara-t-il donc, en lui proposant son bras, pour continuer la balade. Ce rapprochement n’était pas anodin, bien entendu, et ils dépassaient sans doute quelques limites invisibles tracées par les règles de la bienséance… Mais chaque fois que la rousse l’autorisait à en franchir une nouvelle, le Wicker avait plus d’espoir qu’elle ne songeait plus à un retour, et s’avançait vers un avenir dans lequel elle se liait de plus en plus à lui. Peut-être que plus de femmes qui n’en sont pas mériteraient d’être pourtant traitées comme des princesses. Dois-je comprendre que vous n’appréciez pas la dévote admiration dont l’on vous couvre, ou bien ne supportez-vous pas les services constants dont vous fait bénéficier votre condition ?
Ces paroles n’auraient surement pas pu etre prononcé par un homme qui n’avait pas connu, comme lui, les affres de la pauvreté. Aucun pur gentilhomme n’oserait remettre en question les privilèges dont leur naissance élevée les entouraient, de droit. Mais le Wicker laissait entrevoir cette autre part de sa personnalité : celle qui connaissait avec trop de justesse la valeur de ce qu’il avait acquis, regagné, avec le sang et la sueur. Et il était curieux de savoir ce que la demoiselle pensait de son statut, tout en se défiant de ressembler à une princesse d’aucune sorte. Il lui adressa un sourire amusé, car il jouait ainsi à la tester. S’il était plus qu’enthousiaste à cette conversation, et aux liens qui se créaient déjà malgré eux à travers un débat plus que vif, John restait toujours sur la réserve. Il ne se marierait qu’une fois, et il craignait de se tromper. S’il n’avait aucun doute quant à sa propre capacité à garder une femme toujours comblée, il s’inquiétait de sa propre nature d’homme, qui le pousserait peut-être à la lassitude avec une épouse qui ne saurait lui répondre comme il l’espérait, ou plutôt comme il ne l’espérait pas, de manière à toujours le surprendre, et rendre son quotidien à ses côtés intéressant.
- Je vous supplies de cesser toutes ces flatteries, Ambrosine, ou je pourrais en prendre arrogance à votre égard, rit John, pour faire comprendre à la jeune fille que ses paroles ne l’avaient en aucun cas vexé si cruellement, et qu’il ne lui tenait guère rigueur de sa prudence, pas plus que ne la laisserait s’épandre d’excuses et de justifications. J’ai bien compris que je vous plaisais, et je pense même que cette maladresse à vouloir m’épargner un jugement trop rude ne fait que traduire votre trouble face à une situation pour le moins inattendue pour vous. J’en conclus donc que vous avez été honnête sur le fait qu’aucun homme n’ait été si loin dans votre estime et je m’amuse d’imaginer votre première impression en comprenant que votre mère avait organisée une nouvelle rencontre sans votre aval… Je suis ravi d’avoir su dépasser cette étape, et j’aimerais donc repartir sur de bonnes bases en vous invitant, vous-même, directement, pour un autre rendez-vous dont vous définirez les termes tels qu’ils vous conviendraient, en tout bien et honneur.
Encore une fois, traitant d’un sujet important, il s’était arrêté pour la positionner face à lui, et pouvoir la fixer franchement. John n’était pas avare de ses échanges, qui apportaient une autre dimension d’intensité à tous les rapports. Il aimait pouvoir lire les véritables réponses dans les yeux de ses interlocuteurs, pour ne pas se laisser tromper par des promesses qui n’étaient que des mots. Bien sûr, il ne précisa pas qu’il demanderait malgré tout l’avis de ses parents, par convenance, mais il ne doutait pas une seconde de pouvoir obtenir leur accord. Pour la première fois depuis qu’ils s’étaient éloignés, le regard de John s’attarda sur les lèvres de la demoiselle, et il eut l’envie de l’embrasser, pour sceller ce contrat qui se profilait. Il fut presque surpris par ce réflexe qu’il n’avait pas anticipé, et fut effrayé un court instant qu’elle ait perçu son intention et en ait pris ombrage, aussi il s’écarta légèrement. Les démonstrations physiques faisaient partie de son caractère : son corps parlait souvent autant que ses pensées, plus ou moins violemment.
- Peut-être craignez-vous de trop aimer la compagnie d’un homme, Ambrosine, et de vous condamner vous-même à changer pour vous adapter à cet opinion que vous reniez pour l’instant ? Reprit-il, avec un air plus sérieux. Je ne peux pas vous promettre de vous rendre heureuse, mais je vous jure d’essayer si vous m'aidez, et de ne jamais vous rendre malheureuse, si cela peut faire office de compensation. La liberté se trouve dans la façon dont on fait siennes ses chaines sans pourtant les briser… Car il n’existe pas un seul homme qui ne possède pas de boulet, je crois, d’une quelconque manière. Apprenez-moi quels maillons risqueraient de vous blesser, et je les polirai pour vous, si vous me jugez jamais responsable de vous en accabler.
John avait multitude de défaut, mais la personne qu’il chérissait le plus au monde étant une femme, il ne pouvait tolérer l’idée de vivre pour torturer quelqu’un de son genre. Il n’aspirait pas à la domination d’un foyer froid, il gardait précieusement l’idée de former une famille dans laquelle chaque membre pourrait s’épanouir pleinement au contact des autres. La vision que lui fournissait la Bellamy lui semblait donc bien loin de ce qu’il avait jamais envisagé.
- Si je peux me permettre un conseil, mademoiselle, tentez de voir les choses autrement, et posez-vous cette question : que perdriez-vous à ne pas essayer le mariage ? John s’était de nouveau rapproché, un peu plus enflammé parce qu’il n’appréciait pas ces derniers mots immérités. Ne regretteriez-vous pas, à cet instant, de me laisser partir sans espoir de retour, et ne jamais savoir si je pouvais réellement vous offrir ce futur que je vous fais miroiter ? Les risques ne font-ils pas partie de la vie ? Les meilleurs choses ne viennent-elle pas à ceux qui osent braver leurs craintes de l’inconnu ?
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➣Écrivaine à ses heures perdues
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Sujet: Re: Négociations maritales - Ambrosine & John [Fini] Sam 28 Avr - 22:46
"Négociations maritales"
Ambrosine & John
- Quelle femme se plaindrait d’aussi douces attentions Monsieur ? Je suis ravie d’en être l’objet. Votre remarque est cependant fort à propos : je ne puis souffrir que l’on cherche à se faufiler sous mes jupons dans l’unique but de goûter à ma fortune. A l’inverse d’un mari, je n’aurais aucun mal à m’en délester, et je le cède à ces écornifleurs sans broncher si tel est le prix de ma liberté.
L’atmosphère autour de moi me semblait presque alourdie à mesure que mon cœur se vidait. Non sans crainte, j’offrais sur un plateau doré mes doutes les plus intimes à cet inconnu qui m’écoutait avec une attention redoublée depuis que j’avais mit fin à notre balade. Je me fis la remarque à moi même que malgré nos visions divergentes sur la question du mariage, Monsieur Wicker n’avait cessé de prêter attention à ce que j’avançais sans jamais oser ridiculiser mes arguments ni les excuser sous le compte de l’inexpérience dont j’étais la victime en ce genre de situation. Au fond de moi, j’aimais croire en sa promesse ; mais l’idée qu’il me faisait miroiter n’était-elle pas un appas pour un mariage aussi sordide que celui dont j’avais été le fruit ? Pour sûr Mère avait été séduite par Père lorsqu’il avait demandé sa main auprès de Grand-Papa – cela n’avait pas suffi à faire de leur union l’incarnation du mariage utopique. Car c’était bel et bien ce qu’était le mariage : une utopie. Et en la matière, j’étais convaincue que même Thomas More avait été plus réaliste dans ses propositions révolutionnaires.
Mon cerveau fourmillait de pensées parasites, m’empêchant de discerner le vrai du faux dans son discours bien trop beau pour être sincère. Il étouffait sous la myriade de sensations qui s’emparaient de moi lorsqu’il prenait ma main dans la sienne : la crainte d’y voir un jour une bague, l’espoir d’une échappatoire à cette vague de prétendants dans laquelle Mère m’avait plongé jusqu’au cou ; et un désir que je me découvrais lorsque ses doigts glissaient le long de ma peau malgré le gant supposé la couvrir. Le désir d’un amant à la hauteur de mes attentes, celui d’un partenaire idéal – du père de mes futurs enfants. Les paroles qu’il avait prononcées résonnaient en moi pour venir faire écho à mon souhait le plus précieux - il voulait des héritiers. J’avais toujours été consciente qu’il me faudrait pour cela revoir mes critères de sélection et faire des concessions qui me seraient aussi douloureuses qu’indispensables : aucun homme décent n’aurait voulu d’un enfant hors du mariage et j’ignorais moi-même si j’étais prête à m’attirer le courroux du Seigneur pour un tel caprice ; afin d’obtenir ce que je désirais plus que tout au monde, il m’aurait fallu piocher parmi bastringueurs ou les godelureaux – mais quelle serait donc la vie d’un bâtard Bellamy ? Jamais il n’aurait accès à un quelconque héritage sans l’aval de Père, qui le lui refuserait sans seconde pensée ; quant à sa situation, je n’osais même pas y songer un instant : une entrée dans la société couverte de honte et saupoudrée d’un mépris non dissimulé. Je me connaissais assez bien pour être certaine de ne pas avoir assez d’ignominie en moi pour imposer un tel sort à une âme innocente. Je voulais pour lui un père qui saurait l’élever dans une famille radieuse et une atmosphère favorable à son développement physique et intellectuel – toutes ces perspectives qui rejoignaient avec harmonie les serments que m’offrait mon prétendant. Je ne pouvais pas me permettre de balayer sa proposition comme j’avais pu le faire face aux précédentes demandes en mariage qui m’avaient été adressées, ne serait-ce que pour l’avenir de mes futurs enfants. Je me promettais d’y réfléchir scrupuleusement, en l’attente de notre prochain rendez-vous.
- Vous apprendrez monsieur que je suis aussi généreuse en compliments qu’en critiques, lui répondis-je en riant à son commentaire moqueur. Et vous ne m’avez pas encore offert l’occasion de vous adresser ces dernières contrairement à vos prédécesseurs.
De fait, jamais une rencontre ne s’était tant éternisée sans que mon prétendant ne remette en question ses intentions, et moi sa ténacité.
- J’espère avoir l’occasion d’en apprendre un peu plus sur vous lors de notre prochaine rencontre, confirmai-je implicitement sa suggestion. Que diriez-vous d’une promenade à cheval dans le domaine familial ? Père possède un large terrain qui plaît beaucoup aux bêtes lorsque vient le printemps. Savez-vous monter Monsieur ? L’interrogeais-je avec un sourire espiègle, parfaitement consciente du double sens qu’engendrait la formulation.
Si je n’attendais qu’une réponse des plus banales et convenables sur sa manière de dompter les chevaux, une part de moi mourrait d’envie de savoir s’il serait sensible au sens implicite de ma question. Son regard impénétrable était bel et bien fixé sur moi depuis que nous avions quitté la compagnie de mes gens, et maintenant plus que jamais, je le sentais glisser furtivement de mes yeux à mes lèvres sans oser s’y aventurer. Sage décision.
A la place, je lui offrais de nouveau ma main gantée qui, bien que représentant une maigre compensation face à l’idée d’un baiser partagé, était un accord tacite pour un contact physique que nous recherchions tout deux malgré notre retenue, une caresse pudique qui défiait la bienséance que nous étions supposés respecter : lui en tant que gentilhomme et moi, en tant que jeune fille de bonne famille.
- Je vous remercie de votre dévouement Monsieur, et vous promets d’envisager votre proposition avec autant de zèle que vous m’en voyez capable. Contrairement à ce que vous pouvez vous faire comme idée, je désire profondément y croire. Je désire profondément croire en l’idée qu’un mariage avec vous me comblerait et me ferait m’épanouir aussi bien en tant que femme qu’en tant que mère. Votre ferveur à l’idée de me rendre heureuse me touche, c’est pourquoi j’accepte de vous confier mes craintes lorsque le moment sera propice aux confidences, et espère pouvoir vous être aussi douce que vous l’êtes pour moi aujourd’hui, conclus-je avec un léger sourire à travers lequel je tentais de dissimuler l’embarras dans lequel une telle situation me plaçait. Si la demande en mariage me semblait encore bien lointaine, je devais me montrer sincère avec moi-même en reconnaissant que la personnalité aimable de John Wicker ne me laissait pas de marbre. Pour un peu, j’en aurais presque ressenti une affection particulière, que je m’empressai de justifier par un soulagement à l’idée que pour une fois, le fiancé que Mère m’avait choisi n’en avait sûrement pas après mon héritage ou ma capacité à enfanter, quand bien même cela représentait un avantage non négligeable que mon prétendant lui même ne pourrait nier. Aussi pour cette preuve de respect et de compréhension, je me laissais une chance d’être convaincue par son discours que j’écoutais alors avec une ouverture d’esprit semblable à celle dont je faisais preuve dans mes salons.
- C’est précisément la crainte de ne plus pouvoir profiter de ces instants de légèreté et d’insouciance qui me garde d’accepter votre demande. Je refuse d’être prisonnière des regrets irrépressibles d’une décision irréfléchie qui me préviendrait d’en prendre d’autres à l’avenir.
Jamais ma pensée n’avait été plus exposée qu’en ce moment, aussi alambiquée qu’elle puisse être. En entendant ces mots sortir de ma bouche, moi-même je les trouvais ridicules, face aux hypothèses formulées par mon interlocuteur. Sans que je n’ai le temps d’ajouter quelque phrase d’esprit pour venir compléter mon propre argumentaire, les inquiétudes qui m’avaient tourmentées durant tout le temps de notre conversation m’envahirent de nouveau : je n’étais pas faite pour finir vieille fille, comme pouvait l’être mon chaperon. J’avais besoin d’un allié, d’un partenaire. D’une présence masculine à mes côtés. Et si toutes ces caractéristiques étaient rassemblées au sein de l’homme qui me faisait face, pourrais-je vraiment me pardonner de l’avoir ainsi éconduit pour un caprice de jeune fille ?
- Pourtant, je refuse de vous laisser partir, lui avouai-je sans quitter son regard ardent, que je lui rendis même avec une pareille ferveur alors que ma main serrait fiévreusement la sienne, en l’attente d’une quelconque réaction, d’un quelconque signe qui pourrait m’être envoyé pour m’assurer que ce n’était pas la plus sotte des erreurs qu’il m’eut été donné de commettre.
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